Tchad : le Tchad, dirigé par la junte, ouvre la campagne pour le référendum clé de décembre


Tchad commence sa campagne samedi pour le vote d’une nouvelle constitution, ce qui constitue un test de légitimité pour la junte au pouvoir et pour les 30 ans de règne de la dynastie Itno.
Le président de transition, le général Mahamat Idriss Déby Itno, dont la junte gouverne depuis 2021, avait promis de remettre le pouvoir aux civils et d’organiser des élections cette année avant de les reporter à 2024.
Plus de 8,3 millions de personnes dans ce vaste mais pauvre pays du Sahel sont appelées à voter lors d’un référendum prévu le 17 décembre, étape clé vers les élections et l’établissement d’un régime civil.
Selon l’opposition, les ONG et les politologues, le scrutin devrait porter sur le maintien d’Itno et de la « dynastie » de sa famille après trois décennies de pouvoir absolu dont jouit son père Idriss Deby Itno.
« Au-delà de la forme que prendra l’Etat, l’enjeu principal est de permettre au pouvoir de tester sa popularité et sa légitimité, qui sera déterminée par le taux de participation », explique Issa Job, professeur de droit à l’université de N’Djamena.
« La forme de l’Etat n’est pas la priorité », a ajouté Enock Djondang, ancien président de la Ligue tchadienne des droits de l’homme (LTDH).
« Tous ceux qui rejettent ce régime ne peuvent que voter contre ce qu’il propose. »
La nouvelle constitution proposée n’est pas très différente de la précédente, qui concentrait des pouvoirs importants entre les mains du chef de l’État.
Le camp du « Oui » pro-junte soutient un État unitaire, tandis que les opposants soutiennent un modèle fédéral.
Les groupes d’opposition les plus radicaux, dont certains dirigeants se sont exilés depuis la répression sanglante d’une manifestation le 20 octobre 2022, appellent au boycott de ce qu’ils appellent une « mascarade ».
Ce qui est proposé est un « processus électoral solitaire » pour la « perpétuation d’un système dynastique », selon le Groupe consultatif des acteurs politiques (GCAP), une plateforme regroupant une vingtaine de partis.
– Des élections « libres » –
Le 20 avril 2021, une junte de 15 généraux a proclamé le général Mahamat Déby, 37 ans, président pour une période de transition après la chute de son père sur la ligne de front alors qu’il accompagnait les troupes contre les rebelles.
Deby junior s’est engagé à prendre le pouvoir en rendant le pouvoir aux civils et en autorisant des élections « libres » après une période de « transition » de 18 mois.
Il s’est également engagé à ne pas se présenter.
Mais 18 mois plus tard, sur la recommandation d’un dialogue national boycotté par la grande majorité de l’opposition et les groupes rebelles les plus puissants, Mahamat Déby a prolongé de deux ans la période de transition.
Il s’est également permis de se présenter aux élections présidentielles, troquant son uniforme militaire contre un costume civil.
– ‘Massacre’ –
Des manifestations de masse ont éclaté en octobre de l’année dernière après la prolongation de la période de transition et ont été brutalement réprimées par les forces de sécurité.
Entre 100 et 300 personnes ont été abattues par la police, selon l’opposition et des ONG, alors que la population manifestait dans la capitale N’Djamena et au-delà.
Les autorités font état d’une cinquantaine de morts, dont six membres des forces de sécurité.
Jeudi, le gouvernement a accordé une amnistie à « tous les civils et militaires » impliqués dans les troubles, témoignant de la « désir de réconciliation nationale » de la junte.
L’opposition a protesté contre l’idée d’une loi d’amnistie générale destinée à « protéger de la justice les policiers et les militaires à l’origine du massacre ».
Toutes les manifestations anti-régime ont été sommairement déclarées illégales au cours de l’année écoulée, à l’exception d’une figure clé de l’opposition, Succes Masra, qui est revenue d’exil après avoir signé un accord de « réconciliation » avec Déby.
Le 13 octobre, Human Rights Watch (HRW) a exprimé son inquiétude face aux « tentatives visant à limiter la dissidence politique avant le référendum ».
« Pour que ce référendum ait une quelconque légitimité, les partis d’opposition et leurs dirigeants doivent se sentir libres de se réunir et campagne. Dans le cas contraire, le référendum risque d’être perçu comme un moyen de pérenniser le gouvernement de transition. »
La population du Tchad, forte de 18 millions d’habitants, est divisée entre un nord aride et une population musulmane, qui domine le pouvoir depuis plus de 40 ans, et un sud plus fertile, abritant principalement des chrétiens et des animistes.
L’année dernière, le Tchad a été classé au deuxième rang des pays les plus bas au monde selon l’indice de développement humain des Nations Unies et au 167e rang sur 180 pays en ce qui concerne la perception de la corruption par Transparency International.



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