Les trois dimensions d’une fleur


Pour mieux comprendre l’évolution des fleurs, une équipe de recherche en biologie de l’Université de Montréal, du Jardin botanique de Montréal et de l’Université McGill a réussi à utiliser la photogrammétrie pour construire rapidement et précisément, en trois dimensions, un modèle de fleur à partir d’images en deux dimensions. .

La photogrammétrie est couramment utilisée par les géographes pour reconstituer la topographie d’un paysage. Pourtant, c’est la première fois que des scientifiques utilisent la technique pour concevoir des modèles 3D de fleurs afin de mieux les étudier.

Les résultats de leur expérience ont été publiés en octobre dans la revue Nouveau Phytologue.

La photogrammétrie est une approche basée sur des informations recueillies à partir de nombreuses photos prises sous tous les angles. Grâce à la triangulation des points communs présents sur les photos, il est possible de reconstituer un modèle 3D — en l’occurrence, d’une fleur. Les couleurs peuvent ensuite être appliquées à la fleur 3D en utilisant les informations des photos.

Attirer les pollinisateurs par leur forme et leur couleur

Les fleurs sont des structures tridimensionnelles complexes et extrêmement variées. Caractériser leurs formes est important pour comprendre leur développement, leur fonctionnement et leur évolution. En effet, 91 % des plantes à fleurs interagissent avec les pollinisateurs pour assurer leur reproduction dans un environnement 3D. La morphologie et les couleurs des fleurs agissent comme des aimants sur les pollinisateurs afin de les attirer. Pourtant, la structure 3D des fleurs est rarement étudiée.

L’utilisation de la photogrammétrie présente de réels avantages par rapport aux autres méthodes existantes, notamment la microtomographie aux rayons X, qui est de loin la méthode la plus utilisée pour construire des modèles de fleurs en 3D.

« La photogrammétrie est beaucoup plus accessible, car elle est peu coûteuse, nécessite peu d’équipements spécialisés et peut même être utilisée directement dans la nature », explique Marion Leménager, étudiante au doctorat en sciences biologiques à l’UdeM et auteure principale de l’étude. « De plus, la photogrammétrie a l’avantage de reproduire les couleurs des fleurs, ce qui n’est pas possible avec les méthodes utilisant les rayons X. »

C’est Daniel Schoen, professeur de biologie à McGill, qui a eu le premier l’idée d’appliquer la photogrammétrie aux fleurs, alors qu’il effectuait des recherches à l’Institut de recherche en biologie végétale. Les premiers résultats, bien qu’imparfaits, ont suffi à convaincre Leménager d’y consacrer un chapitre de sa thèse.

« La méthode n’est pas parfaite », a-t-elle déclaré. « Certaines parties des fleurs restent difficiles à reconstituer en 3D, comme les surfaces réfléchissantes, translucides ou très poilues. »

Répondre aux questions sur l’évolution des fleurs

« Cela dit, ajoute Simon Joly, professeur de biologie à l’UdeM, grâce aux collections vivantes du Jardin botanique de Montréal, l’étude des plantes de la famille des Gesnériacées, des plantes originaires des régions subtropicales à tropicales, dont la violette africaine est l’une des les représentants les plus connus — démontre que les modèles 3D réalisés à l’aide de cette technique permettent d’explorer un grand nombre de questions sur l’évolution de la forme et de la couleur des fleurs.

« Nous avons également montré que la photogrammétrie fonctionne au moins aussi bien que les méthodes aux rayons X pour les structures florales visibles », a déclaré Joly, qui mène des recherches au Jardin botanique.

Selon les chercheurs, la photogrammétrie a le potentiel de stimuler la recherche sur l’évolution et l’écologie des fleurs en fournissant un moyen simple d’accéder à des données morphologiques en trois dimensions. Des bases de données de fleurs – ou même de plantes entières – pourraient donner aux scientifiques et au grand public un moyen de voir les caractéristiques uniques d’espèces végétales qui restent pour l’instant cachées.

Un protocole détaillé en libre accès a été mis à disposition pour favoriser l’utilisation de cette méthode dans le cadre de l’étude comparative de la morphologie florale. Le libre accès aux collections de sciences naturelles de ce type a pour objectif de contribuer à stimuler l’étude de l’évolution de la morphologie des fleurs à de grandes échelles taxonomiques, temporelles et géographiques.

Il est également possible d’admirer des modèles de fleurs sous tous les angles grâce à une visionneuse de modèles 3D.

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