Anne Hidalgo et le bonheur en Corrèze


À la recherche du temps perdu et de points dans les sondages, la candidate à la présidentielle était de passage ce samedi, pour dédicacer son ouvrage, Une femme française. Dans un registre bien différent, un hommage a été rendu à Denis Tillinac, décédé l’an dernier.

Sorti à la hâte de sa voiture, tiré à quatre épingles dans son costume gris clair, François Hollande arrive à la Foire du livre de Brive en habitué. En ami, même. Et en retard, forcément. Il a une excuse : l’ancien président de la République est en campagne. Pour Anne Hidalgo. Il se montrait à Tulle, au côté de la maire de Paris, plus tôt dans la matinée, ce samedi, pour orchestrer une forme de «passage de relais». La candidate rejoindra, à son tour, dans l’après-midi la manifestation littéraire.

« À quoi sert un ancien président ?», interroge donc François Hollande, son livre Affronter sous le bras, au début de sa rencontre. Ne vous grattez pas la tête, il donne la réponse : mettre à profit son expérience, entre autres par l’écriture. «Essayer de définir une ligne claire pour l’avenir sera mon destin jusqu’à la fin de mes jours.» Les éditeurs sont prévenus. Suit cette intéressante réflexion : «Notre pays est marqué par une vitalité associative mais un désengagement politique.» Aux questions d’Éric Fottorino du 1, ton solennel, l’ancien premier secrétaire du PS évoque l’engagement au Mali, la difficulté à gouverner en temps de crise, l’extrémisme de Jean-Luc Mélenchon et, surtout, l’importance de la social-démocratie en France. François Hollande pourrait écrire un dictionnaire amoureux sur le sujet.

Le ministre « Tiktokeur »

Le message a d’ailleurs été transmis. Anne Hidalgo parle plus de social-démocratie que de socialisme lors du «point presse» organisé au débotté dans un hôtel proche de la foire. La candidate, courtoise avec les journalistes, se dit sereine pour l’élection à venir. Alarmiste dans ses constats, abstraite dans ses développements, elle passe de la nécessité de la transition écologique à « Zemmour qui falsifie l’histoire », avant d’étriller le ministre des Transports Jean-Baptiste Djebbari qui s’amuse sur TikTok. Elle seule saurait être à la hauteur. Ah, un sujet ne vient pas : la littérature. À Brive, c’est un drôle d’oubli.

L’ancien président du conseil général de Corrèze en dédicace. Thierry Matonnat

Assis à leur stand, séparés par Les fantômes de Christophe Boltanski et Les Valois de Didier Decoin, les deux éléphants du PS signent plusieurs heures durant. L’ancien chef de l’État a le selfie facile. Le micro rouge de «Quotidien» se promène en tous sens. Il y a bien une distinction entre le cas Hollande, ce quasi-régional de l’étape chéri par la foule, et celui d’Anne Hidalgo. La maire de Paris est davantage sollicitée par des curieux que par des lecteurs. Quelques-uns sont venus lui dire leur admiration, se réjouit la candidate. Pas tous. Dans la rue, une dame demande à son passage et à haute voix «pourquoi elle ne s’est pas encore pris de tarte à la crème dans la figure».

Denis Tillinac, dans le train du livre menant à Brive, en 2004. Maurice Rougemont/Opale/Leemage

Qu’aurait pensé Denis Tillinac de cette foire très rose ? L’écrivain qui aimait Jacques Chirac, décédé en septembre dernier, était un pilier de la manifestation. Le jeune Guillaume Sire (qui a publié à La Table Ronde, sa maison d’édition), les journalistes Jean-Paul Kauffmann et notre confrère Éric Neuhoff, qui furent ses amis, ont rendu hommage à l’homme du Rate et Corrèze. Et à son bonheur de nostalgie. Sa veuve, Monique, était dans le public. «Denis avait un sens du cocasse et un appétit pour toute chose», témoigne Kaufmann. Tillinac avait le chic de trouver «le bon adjectif», poursuit Neuhoff. Ce qui n’est pas rien. «Avec lui, la vie prenait des couleurs originales», ajoute-t-il. Sacré compliment. Au même moment, le Club athlétique de Brive Corrèze Limousin (CAB), que chérissait cet amoureux de l’ovalie, gagnait, à domicile, contre le Racing 92. 12 à 10. C’était bien la moindre des choses.

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