The French Dispatch, Pig, Las Niñas… Les films à voir ou à éviter cette semaine au cinéma


Un hommage au New yorkais, l’amitié entre un cochon et un ermite, la vie pas si enfantine d’une fillette de Saragosse. Découvrez la sélection cinéma du Figaro.

À voir absolument

La dépêche française , une comédie dramatique de Wes Anderson, 1h48

La dépêche française a été tourné intégralement à Angoulême mais pour l’essentiel en studio, ce qui fait une belle jambe aux amoureux de la cité angoumoisine qui auront du mal à reconnaître Ennui-sur-Blasé. C’est dans cette ville que s’est établi vers 1950 La Dépêche française, un magazine américain à gros tirage. Arthur Howitzer Jr., son rédacteur en chef, vient de mourir et le titre cessera de paraître avec son dernier souffle. Les membres de son équipe se réunissent pour écrire sa nécrologie à partir de leurs souvenirs. C’est le point de départ de quatre histoires.

Wes Anderson est le roi de la miniature, un fou du détail, un adepte de l’élégance et de la précision. Sa méticulosité touche à la poésie. Son hommage au New yorkais multiplie les références, bourdonne de citations. Le tout déborde d’idées et d’invention. Cela frôle parfois le trop-plein. Le noir et blanc succède à la couleur. Une poursuite en voiture est réalisée en dessin animé. Les Tractions Avant zigzaguent dans les rues de la ville imaginaire. La musique s’inspire d’Erik Satie. Une galerie de personnages défile à une allure folle. Il s’agit d’ouvrir l’œil pour repérer Cécile de France, Liv Shreiber, Benjamin Lavernhe, Edward Norton. Elisabeth Moss trace à la craie des équations au tableau. É. S. et E. N.

À voir

Cochon , un thriller de Michael Sarnoski, 1h31

Ancien chef étoilé de Portland, Robin Field a tourné le dos à la gloire et à la ville pour une cabane en forêt en Oregon. Hirsute, se lavant dans les ruisseaux, Rob a pour seule compagnie son fidèle cochon, avec lequel il savoure des tartes aux champignons. Ensemble, ils dénichent des truffes, aussitôt revendues à Amir, un fournisseur de produits de luxe. Une nuit, une bande de junkies entre par effraction dans le taudis et enlève le porc. Ce rapt contraint Rob à revenir à la civilisation. Pister les kidnappeurs va le ramener à ce qui l’a fait renoncer au monde. C. J.

Filles , un drame de Pilar Palomero, 1h30

On est trop sérieux quand on a 11 ans. Celia vit seule avec sa mère à Saragosse. Une nouvelle élève débarque dans son école religieuse. Brisa vient de Barcelone. Elles vont grandir ensemble. Elles ont des fous ­rires et des secrets. Elles sont voisines, se raccompagnent dans des rues écrasées de chaleur. Une camarade traite Celia de « petite orpheline ! ». Son père est mort avant sa naissance. Les copines portent des chemises blanches et des pulls en V bleu marine. La sexualité commence à les titiller. Ça n’est pas les cours que leur donnent les bonnes sœurs qui risquent de les renseigner. Elles trouvent des préservatifs dans un tiroir chez la mère de l’une d’elles. Elles jouent avec en pouffant. […] Filles a l’élan, la sincérité d’un premier roman où l’auteur a envie de tout dire, mais ­résiste à cette envie. L’argent de poche, les différences sociales, tout cela est ­esquissé, suggéré, plus que montré. C’est la bonne méthode. Un voyage chez la grand-mère, une visite au ­cimetière serviront de catharsis. À la fin, Celia chante dans une chorale. Son regard se perd dans le lointain. Qu’est-ce que l’avenir lui réserve ? On espère au moins que son passé l’aidera à ne pas devenir comme les autres. C’est tout le mal qu’on lui souhaite. SON. Non.

La Fracture , une comédie dramatique de Catherine Corsini, 1h38

La nuit porte rarement conseil. Surtout quand on écrit des textos. Raphaëlle en fait la triste expérience au petit ­matin lorsque sa compagne lui indique que c’est définitivement fini entre elles. Elle n’a donc pas lu ses ­messages ? « Celui de 5 h 42, 5 h 46 ou 5 h 48 ? », rétorque Julie excédée. Raph (Valeria Bruni-Tedeschi) veut parler, Julie (Marina Foïs) n’a plus rien à lui dire. Pire, elle fuit et ne se retourne pas quand Raph glisse sur l’asphalte parisien et chute lourdement. Les pompiers ramassent une femme en vrac, mais qui parle encore. Direction l’hôpital. Ce même jour, Yann (Pio Marmaï), un ­routier sympa arrive en fanfare avec son 38 tonnes dans les rues de la capitale. Il vient manifester avec les « gilets jaunes » contre la politique de Macron. Lui aussi parle beaucoup mais les CRS ne sont pas là pour l’écouter. […] Catherine Corsini (Un amour impossible, La Belle Saison) a choisi cette arène pour évoquer les fractures sociales qui divisent le pays dans ce qui est sa ­première comédie. Elle y confronte une bobo parisienne, dessinatrice de BD à tendance hystérique à un travailleur provincial, chauffeur de poids lourds à tendance excité. FD

Barbaque , une comédie de Fabrice Éboué, 1h32

Éboué campe Vincent, boucher de banlieue endetté, méprisé par sa femme Sophie (Marina Foïs), humilié par son ami Marc (Jean-François Carey), boucher industriel riche et vulgaire. Pour arranger le tout, le petit copain de sa fille est un vegan non violent mais pas moins intolérant – ni viande ni vin : « Château Saint-Émilion ? Château ­Auschwitz, oui » – que le commando qui saccage sa boutique. Quand Vincent écrase par accident un militant de la cause animale, il le transforme en ­jambon que Sophie vend par mégarde. Les clients se mettent à raffoler de ce porc d’Iran, un soi-disant élevage ­sauvé de l’extermination au moment de la révolution islamique. SON. S.

On peut voir

« Rétrospective Hammer: sex & blood » Dr Jekyll et sœur Hyde , Les Horreurs de Frankenstein ou encore Les Cicatrices de Dracula

À la fin des années 1970, le studio anglais revisite les grands mythes gothiques avec une touche de modernité (gore, érotisme, humour, ou les trois à la fois). À (re)découvrir. SON. S.

Le Pardon , un drame de Maryam Moghadam et Behtsash Sanaeeha, 1 h 45

En Iran, on ne rit pas. Le carcan de la société pèse lourd. Voile léger sur la tête, Mina pleure son mari exécuté à tort et cherche un coupable. «C’était, après tout, la volonté de Dieu», s’entend-elle répondre. Ce film élégant évite la caricature et se concentre sur les relations nouées par la veuve. Avant de s’enliser. L’intrigue aurait mérité davantage de rebondissements. PA

À éviter

La nuit dernière à Soho , un film d’horreur d’Edgar Wright, 1 h 57

Apprentie styliste harcelée par ses pairs, Eloise (Thomasin McKenzie) est fan des sixties et sujette à des visions. Ça tombe bien. La chambre qu’elle loue à une vieille Londonienne (Diana Riggs) lui fournit un portail direct vers sa décennie fétiche qu’elle découvre à travers les yeux de la pulpeuse Sandie (Anya Taylor-Joy, la star du Jeu de la Dame), aspirante chanteuse sous la coupe d’un imprésario douteux. Après une demi-heure aux couleurs bonbon et à l’optimisme naïf, la fable dérape dans un « giallo » gore et laid. Superposant récit féministe, allégorie de la folie avec les codes du film de fantômes (tristes spectres ravagés par de mauvais effets spéciaux dignes de Buffy contre les vampires), ce voyage dans le temps tourne au millefeuille indigeste à l’issue prévisible. C. J.

Le sien , un thriller de Guillaume Canet, 1h28

Le pauvre. Ce compositeur est en panne. Pour retrouver l’inspiration, il se réfugie dans une île bretonne. Dans la maison, le piano est désaccordé. Dans le film, il n’y a pas une note juste. Canet a tout fait : il a écrit, mis en scène, interprète le personnage principal et même son double. C’est trop et cela donne du Trop belle pour toi raté. Sur un air de TenCC, l’imaginaire de l’artiste convoque son entourage, famille et maîtresse, dans son esprit surmené. Cette tempête sous un crâne souffle dans le vide. Un couteau dans le ventre comme dans Buffet froid, à trois dans un lit comme dans La femme de mon pote : c’est idiot d’imiter Bertrand Blier. Il est le seul à savoir faire du Blier. Les dialogues tombent à plat. Le saugrenu n’est pas au rendez-vous. Tout cela assez gênant. Efira et Casta se débrouillent comme elles peuvent. Seule la maison aux volets bleus tire son épingle du jeu. Mais après ça, qui va encore vouloir la louer l’été prochain ? Il faut absolument signaler à Canet qu’un imposteur a usurpé son identité pour tourner cette chose. Il ne nous reste que nos yeux pour pleurer devant ce désastre non dénué de suffisance. Préparez vos mouchoirs. Les petits ? SON. Non.

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