Un squelette indonésien serait apparenté à un groupe humain inconnu


Selon une nouvelle étude parue dans la revue La nature, une adolescente décédée en Asie du Sud-Est il y a plus de 7000 ans attesterait de la rencontre entre les Dénisoviens et les humains modernes.

L’ADN a parlé. Les vestiges d’un individu découvert il y a six ans en Indonésie n’appartiendraient pas à un homo sapiens contemporain égaré, ni même à l’un de nos lointains ancêtres connus, mais au premier représentant identifié d’un groupe humain dont l’existence n’avait été jusqu’alors que soupçonnée. Replié sur lui-même en position fœtale, le squelette serait celui d’une adolescente âgée de près de 18 ans à sa mort, restée cachée dans les profondeurs d’une caverne de Célèbes pendant plus de 7000 ans. Grâce à son ADN miraculeusement bien conservé, elle devrait permettre d’éclaircir les mouvements de populations dans l’Asie du Sud-Est préhistorique.

«C’est la première fois que l’on fait état de la découverte d’ADN humain ancien dans la grande région des îles qui vont du continent asiatique à l’Australie», s’est réjoui vendredi à l’AFP Adam Brumm. Cet archéologue de l’université australienne Griffith a co-dirigé une enquête scientifique et internationale de longue haleine ayant mobilisé près de 30 chercheurs, pour l’essentiel issus d’universités allemandes, australiennes et indonésiennes. Leur étude, publiée mercredi dans la revue scientifique La nature , montre que – grâce au matériel génétique collecté en quantité et qualité suffisante – la jeune femme préhistorique appartenait à une population qui avait précédé de quelque 3000 ans les ancêtres des peuplades actuelles de l’île. Baptisée Bessé par les chercheurs indonésiens de l’équipe, cette chasseuse cueilleuse avait été découverte au milieu d’objets identifiés comme toaléens, un groupe de chasseurs-cueilleurs de cette région de l’ère quaternaire connu uniquement par l’étude indirecte de leur culture matérielle. Bessé en serait la première représentante connue.

La grotte de Leang Panninge, à Célèbes, où a été découvert Bessé. Projet de recherche Leang Panninge

Un champ d’étude prometteur

Mieux encore, le génome analysé par les scientifiques révélerait également l’existence d’un groupe humain jusqu’alors inconnu dans le reste du monde. D’après leur étude, cette lignée humaine divergente se serait ramifiée des autres populations connues de la région, il y a environ 37.000 ans environ. Quant à la partie connue du patrimoine génétique de Bessé, elle permettrait de tisser des liens lointains – notamment d’ordre morphologique – avec les populations Papous contemporaines et des groupes australiens autochtones. Les chercheurs ont aussi découvert des traces d’ADN denisovien, dont les représentants n’ont, pour l’heure, été découverts qu’en Asie centrale. Leur patrimoine génétique, en revanche, se retrouverait en partie parmi les populations australiennes et de Nouvelle-Guinée.

Les chercheurs considèrent cette découverte comme d’autant plus unique que les squelettes anciens se dégradent rapidement sous le climat tropical humide. Cette dégradation vaut aussi pour le matériel génétique de l’individu, qui devient alors inexploitable pour toute étude scientifique probante. «C’est très rare de découvrir des restes d’ADN humain ancien sous les tropiques, c’est pourquoi c’est une découverte particulièrement heureuse», a noté Adam Brumm pour l’AFP.

L’aire des îles australasiennes, appelée Wallacea par les scientifiques, comprend les îles indonésiennes à l’est de Bornéo jusqu’au nord de la Nouvelle-Guinée. Peu étudiée historiquement, elle forme un champ géographique des plus prometteurs pour la recherche en préhistoire, à l’exemple de cette étude qui relance les pistes de recherche sur le peuplement humain de la région. Celle-ci pourrait ainsi avoir été un point de rencontre fécond – dans tous les sens du terme – entre les Humains modernes et les Dénisoviens. Comme l’a résumé l’archéologue Adam Brumm à l’AFP: «Cela montre à quel point nous comprenons encore peu de choses sur l’histoire des premiers humains dans les îles du Wallacea.»

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