Émotions et scandales, dix moments inoubliables qui ont marqué le Festival de Cannes


La vie douce de Fellini sifflé, le doigt d’honneur de Quentin Tarantino, Le Chant des Africains des héros d’Indigènes… Jusqu’à son dernier jour de compétition, la quinzaine écrit l’histoire du 7e de l’art.

Si le Festival de Cannes m’était conté. Depuis ses débuts, la quinzaine azuréenne vit de ses émotions et de ses scandales. De La vie douce de Federico Fellini, hué sur la Croisette, aux héros de I.ndigènes qui reprirent la marche militaire Le Chant des Africains, en passant par le doigt d’honneur de Quentin Tarantino et la reprise du Tourbillon de la vie par Vanessa en hommage à Jeanne Moreau, Le Figaro revient en images sur les épilogues historiques du plus prestigieux festival du monde.

  • 2006: les acteurs d’Indigènes entonnent Le Chant des Africains

«C’est nous les Africains qui revenons de loin, nous venons des colonies pour sauver la patrie…». Ils sont les héros d’Indigènes de Rachid Bouchareb. Ils ont incarné les soldats algériens et marocains qui, du Sahara jusqu’en Allemagne en passant par la terrible bataille de Monte Cassino en Italie, ont combattu avec ardeur pour les forces françaises et alliées contre l’armée allemande. Le jour de la clôture Bernard Blancan, Jamel Debbouze, Roschdy Zem, Sami Bouajila et Samy Naceri entrent à leur tour dans l’histoire du Festival et de la France en chantant les paroles d’une marche militaire écrite en 1915 pour une division marocaine.

  • 1999: Sophie Marceau prise d’une émotion incontrôlable

La Croisette semble avoir un effet terrible sur Sophie Marceau. Avant d’exhiber, malgré elle, ses charmes au détour d’un coup de vent qui dévoilera un sein (en 2005), l’actrice française aura dû se confronter à l’exercice difficile de remettant de la palme d’or. Hésitante, cherchant ses mots, elle laissera pantois le public éclectique du palais des Festivals. Kristin Scott Thomas est obligée de l’interrompre. Et malgré cette piteuse prestation, qu’elle tente encore aujourd’hui d’expliquer, les frères Dardenne seront quand même bien heureux de recevoir la palme d’or pour Rosette cette année-là.

  • 1998: la joie extatique de Roberto Benigni

Quoi le 24 mai La vie est belle pour Roberto Benigni. Le jury, présidé par Martin Scorsese vient de lui le Grand prix du jury. Le cinéaste italien, qui joue aussi le rôle de ce père qui se sacrifie pour sauver son fils dans le film, est aux anges en découvrant qu’il a gagné ce précieux trophée. Son bonheur devient communicatif. Il embrasse de toutes ses forces Isabelle Huppert. Il se prosterne devant Martin Scorsese, puis remercie chacun à leur tour tous les jurés. Ce jour-là, Roberto Benigni, aux yeux de tous, a remporté la palme d’or de la joie.

  • 1995: l’hommage tourbillonnant de Vanessa Paradis à Jeanne Moreau

«On s’est connu, on s’est reconnu, on s’est perdu de vue, on s’est reperdu de vue…» Cette année-là, Jeanne Moreau est présidente du jury. Personne n’a oublié la Catherine de Jules et Jim qui aimait deux hommes. Vanessa Paradis décide de lui rendre hommage en chantant Le Tourbillon de la vie. Émue, la grande actrice reprendra, elle aussi, quelques vers de la ritournelle.

  • 1994 : Le Pulp Fiction et le doigt d’honneur de Quentin Tarantino

Toujours excessif comme son cinéma, ce Quentin Tarantino ! Le réalisateur, en ce beau jour de la fin mai vient de recevoir la récompense suprême : la palme d’or. Après quelques applaudissements mérités, un spectateur dans la salle s’écrie : «Quelle daube !». Commentaire que ce festivalier agrémente d’une autre exclamation injurieuse. À ces mots, le sang de Tarantino ne fait qu’un tour et son majeur se lève. Ce sera la réponse du cinéaste… définitive.

  • 1993: Jane Campion, la première femme palme d’or

Il a fallu attendre pas moins de quarante-six festivals avant qu’une femme ne puisse être couronnée d’une palme d’or. En 1993, Jane Campion qui a dirigé La leçon de Piano reçoit enfin le trophée suprême. Les esprits chagrins noteront quand même qu’elle a dû partager cet honneur avec le réalisateur chinois Chen Kaige, le maître d’œuvre d’Adieu ma concubine.

  • 1987 : Maurice Pialat en Diable de la Croisette

Au printemps 1987, le jury présidé par Yves Montand décide, à l’unanimité, de décerner la palme d’or à Maurice Pialat pour la réalisation de Sous le soleil de Satan, un film inspiré du roman de Georges Bernanos. Le public réagit en sifflant. Fidèle à son anticonformisme, le cinéaste réplique avec cette sentence inoubliable pour la fameuse grande famille du cinéma : «Si vous ne m’aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus.»

  • 1973 : La Grande Bouffe … jusqu’à l’indigestion

Marco Ferreri a réuni une pléiade de grands acteurs. Marcello Mastroianni, Philippe Noiret, Michel Piccoli et Ugo Tognazzi vont, pour lui et les besoins du scénario, bégayer à mort. Dans La Grande Bouffe, le réalisateur italien décrit, à en vomir, la décadence de la bourgeoisie. Le scandale dure toute la quinzaine. Quand le film reçoit le prix FIPRESCI (prix de la critique internationale) du festival de Cannes en 1973, ex aequo avec La Maman et la Putain, le public éructe. Philippe Noiret, toujours philosophe mais sans se renier, déclare : «Nous tendions un miroir aux gens et ils n’ont pas aimé se voir dedans. C’est révélateur d’une grande connerie.»

  • 1966 : Ces messieurs dames , «un monument de vulgarité » ?

Comme Janus, le Festival présente souvent deux visages. En 1966, le jury consacre ex aequo Un homme et une femme de Claude Lelouch et Ces messieurs dame de Pietro Germi. Le premier est une belle histoire d’amour, le second est une satire sans nuance de la bourgeoisie italienne. La critique et le public vont crier au scandale: pourquoi n’avoir pas uniquement récompensé le cinéaste français ? Avec cette injustice, Cannes continue d’écrire son histoire faite de soufre et de grandeur.

  • 1960 : La vie douce , un chef-d’œuvre qui dérangea

La chose paraît aujourd’hui inconcevable. La vie douce n’a pas fait l’unanimité lors de sa présentation sur la Croisette, en 1960. L’oisiveté et la débauche magistralement mises en scène par Federico Fellini provoquent des sifflements lorsque le jury décide de décerner la palme d’or au Maestro romain. L’histoire du septième art et de Cannes est ainsi faite. Il faudra que le temps fasse son œuvre pour que le duo Marcello Mastroianni-Anita Ekberg immortalise à jamais, comme le Colisée, le génie de Rome.

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