Mort du dessinateur Benoît Sokal, le créateur de Syberia et de Canardo


Un des auteurs vedettes d’A suivre dans les années 1980, le Belge avait également marqué de sa patte le monde du jeu vidéo, au tournant du millénaire.

Il était l’une des passerelles entre l’art de la bande dessinée et celui du jeu vidéo : l’artiste belge Benoît Sokal est mort vendredi, à l’âge de 66 ans. Bruxellois de naissance, l’infatigable illustrateur s’est éteint à Reims, des suites d’une longue maladie, a affirmé son ami François Schuiten à l’AFP. Fasciné par les animaux, celui qui allait devenir dessinateur s’est longtemps imaginé devenir vétérinaire avant de changer de voie, profondément influencé par les aquarelles de son compatriote René Hausman.

Après une formation à l’Institut des arts Saint-Luc de Bruxelles, Benoît Sokal prend son envol à partir de 1978, entre les pages de la revue A suivre, où il se fait un nom aux manettes des aventures crépusculaires de l’inspecteur Canardo, improbable flic débauché aux femmes, aux cigarettes et à l’alcool. Très populaire dans les années 1980, le dessinateur a consacré une vingtaine d’albums chez Casterman à ce canard canaille, dont il écrivait également le scénario. Il en avait achevé la série en 2018, très exactement quarante ans après la première apparition du personnage. «Canardo est une série très importante», a témoigné pour l’AFP François Schuiten, dessinateur, collaborateur et ami de Benoît Sokal. «C’est l’antihéros parfait, un alcoolique insupportable, qui a beaucoup de tares. À la fin des années 1970, c’est un personnage qui va devenir l’un des emblèmes d’A Suivre, qui a révélé beaucoup d’auteurs».

Accro à tous les vices, l’inspecteur Canardo a fait la renommée de Benoît Sokal (détail de la couverture d’Une bavure bien baveuse). CASTERMAN

Une passage réussi par le jeu vidéo

Curieux de tout, les développements et les progrès fracassants des technologies liées au jeu vidéo à partir du milieu des années 1990 n’ont pas manqué d’attirer l’attention de Benoît Sokal. Ce médium qui était jusqu’à présent limité par la quantité réduite de données qu’il pouvait emporter s’ouvre à cette époque à des œuvres beaucoup plus ambitieuses, en particulier avec l’essor du CD-ROM. Son premier titre, L’Amerzone : Le Testament de l’explorateur, sort ainsi en 1999, avec le soutien des Français de chez Microids. Fort de cette première expérience qu’il a supervisé de A à Z, Benoît Sokal renouvelle son partenariat avec Microids pour un second jeu vidéo, le poétique Syberia, qui paraît en 2002 et qui connaîtra deux suites, en 2004 et 2017. «Dans l’univers des jeux vidéo, il avait une touche très personnelle, un univers très original, c’est assez rare», a commenté François Schuiten pour l’AFP. Une quatrième entrée à sa série Syberia, en préparation depuis 2018, devrait sortir dans le courant de l’année.

Malgré ses échappées dans l’univers du jeu vidéo, Benoît Sokal n’avait pas pour autant remisé son amour pour les albums physiques et les sorties en librairie. En dehors de Canardo, il s’était notamment lancé – toujours avec Casterman – dans une trilogie «aux accents écologistes», Kraa, parue entre 2010 et 2014. Le dessinateur avait enfin collaboré ces dernières années avec François Schuiten sur le premier tome de la BD Aquarica, paru aux éditions Rue De Sèvres en 2017. La sortie du second volume, dont Benoît Sokal avait presque achevé les dessins, est attendue pour l’année prochaine. «Cet amoureux de la nature a marqué l’entrée du catalogue dans l’âge adulte par ses récits satiriques où il manie avec brio l’humour noir et l’ironie», a témoigné samedi l’éditeur Casterman, qui accompagnait Benoît Sokal depuis 1978.

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