À Clichy, le changement de nom de l’école Louis-Aragon crée la polémique


L’établissement sera rebaptisé du nom de la première spationaute française, Claudy Haigneré. Les élus de gauche crient à la manipulation politique, y voyant un cas de «cancel culture».

Étonnante initiative, prise par le conseil municipal de la mairie de Clichy-la-Garenne, mardi 18 mars, concernant l’école primaire Louis-Aragon. L’institution scolaire va être débaptisée et renommée Claudie-Haigneré, du nom de la première spationaute française et européenne, dans le sillage d’une campagne, plus large, de féminisation des noms de rues de la commune. Certaines d’entre elles ont d’ailleurs pris les noms de Marguerite Yourcenar, Gisèle Halimi, Olympe de Gouges ou encore Charlotte Perriand.

Mauvaise réputation

Sans doute le poète (1897-1982) aurait-il vu dans ce changement de nom l’avancée logique de l’Histoire avec un grand «H». «L’avenir de l’homme, c’est la femme», écrivait l’ancien résistant communiste, dans son Poème de l’avenir. Au-delà de la démarche féministe, la mairie explique que le nouveau nom doit permettre de faire oublier la réputation de l’établissement. Pour le maire LR Rémi Muzeau et son administration, l’école pâtirait de commentaires disgracieux sur la toile et d’un article peu flatteur du Parisien , publié en 2017, relatant un fait divers dérangeant: une fillette de sept ans aurait jeté une chaise sur son enseignante avant de la frapper.

Dans les colonnes de L’Obs , Véronique Cabasset, maire adjointe en charge des affaires scolaires à Clichy, tente de défendre le choix municipal. «Pour redonner sa chance à cette école, nous avons aussi voulu lui apporter une dominante scientifique, explique-t-elle. C’est pour cette raison que nous avons souhaité lui donner le nom d’un scientifique, qui plus est d’une femme. Celui de Claudie Haigneré s’est imposé. Et les équipes enseignantes comme les parents d’élèves s’en sont montrés satisfaits.»

Cancel culture ?

Dans les rangs de l’opposition de gauche, inutile de dire que l’initiative est loin de faire l’unanimité. Pour les élus communistes, qui ont perdu la ville en 2015 : il s’agit d’une manipulation politique visant à effacer Aragon de l’histoire de la commune. Certains vont même jusqu’à parler de «cancel culture», comme le conseiller municipal et élu PCF Hicham Dad: « Le motif invoqué est totalement fallacieux. Supprimer le nom sur la devanture d’une école est extrêmement violent, surtout dans une ville comme Clichy qui a particulièrement souffert du fascisme. C’est effacer l’histoire de la Résistance qu’incarne Aragon. Puisqu’ils voulaient donner des noms de femmes, nous avons proposé d’ajouter celui d’Elsa Triolet, qui en plus d’être la compagne d’Aragon, n’était pas n’importe qui: la première femme prix Goncourt ! Bien sûr que cette décision est politique, surtout quand on pense que Claudie Haigneré a été ministre du gouvernement Raffarin !»

Moins véhément, l’élu écologiste Alain Fournier, membre de la Commission chargée de la dénomination des rues et des lieux publics ne nie pas l’apparente mauvaise image de l’établissement. Mais il juge qu’il s’agit d’un mauvais prétexte pour rebaptiser l’établissement. «Est-ce que vous pensez qu’une prétendue mauvaise image se modifie avec un simple changement de nom ? C’est complètement ridicule et absurde», déclarait-il en conseil. Afin de calmer les esprits, le maire LR de Clichy, Rémi Muzeau, aurait proposé, lors du vote, de renommer un autre lieu du nom du poète. Proposition rejetée, pour l’heure, par les défenseurs d’Aragon.

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