La Part des anges, The Dissident, Sacrées Sorcières… Les films en ligne à voir, ou pas, cette semaine


Durant la crise sanitaire et la fermeture des cinémas, la rédaction du Figaro vous propose tous les mercredis une sélection de nouveautés disponibles sur les plateformes de streaming ou en VOD.

À voir absolument

La Part des anges , un Ken Loach (bien) vieilli en fût

À Glasgow, Robbie, tout jeune père de famille, est constamment rattrapé par son passé violent. Écopant quelques heures de travaux d’intérêt général, il rencontre un éducateur qui va changer son existence. Le vieux Henri est un passionné de houblon. De visites de distilleries en séances de dégustation, les vauriens dont il s’occupe s’amadouent, retrouvent goût à la vie. Mais l’occasion d’une nouvelle arnaque se profile. Va-t-elle replonger Robbie dans l’ornière? Avec son compère de toujours, le scénariste Paul Laverty, Loach (palme d’or à Cannes en 2006 avec Le vent se lève) renouvelle avec bonheur son incursion dans la comédie. La Part des anges est plus abouti que Looking for Eric. Fidèle à son habitude, il a choisi de diriger des comédiens non professionnels à l’image de Paul Brannigan qui incarne le personnage principal. Rythmé et plus profond qu’il n’y paraît, La Part des anges prouve que Loach ressemble à un grand whisky. Plus il prend de la bouteille, plus ses films respirent, et enivrent les spectateurs.

Disponible sur Arte.tv

À voir et à revoir

The Dissident , la vérité rien que la vérité

The Dissident, du réalisateur canadien Bryan Fogel, qui reçut un Oscar avec Icare, n’est pas seulement un magistral documentaire d’investigation sur l’horrible assassinat de Jamal Khashoggi, le 2 octobre 2018, au consulat saoudien d’Istanbul. C’est aussi une histoire d’amour entre le dissident saoudien et une jeune chercheuse turque, mêlée au récit de l’impitoyable traque des opposants saoudiens à l’étranger. Traque rendue possible par la technologie livrée par l’ancien ennemi israélien à son nouvel ami saoudien, préfiguration inquiétante d’un nouveau Moyen-Orient, pas forcément meilleur que l’ancien. Ce captivant thriller nous plonge dans les dernières minutes de la vie du journaliste, démembré par une équipe de tueurs venus d’Arabie. Grâce aux images fournies par la police turque et aux enregistrements des renseignements turcs, on assiste presque en direct à cette macabre tuerie. Fogel reconstitue le piège tendu à Jamal Khashoggi, cinq jours plus tôt, quand il va au consulat pour obtenir une attestation pour épouser Hatice Cengiz. Il en ressort étrangement détendu, lui qui ne cesse pourtant de se méfier depuis qu’il a quitté l’Arabie, un an plus tôt, se sachant menacé.

Disponible en streaming sur Amazon Prime Video, et en VOD sur Canal + et Orange

Full Metal Jacket, le culte de la guerre

Attention chef-d’œuvre ! Réalisateur hors normes, Stanley Kubrick propose, avec Full Metal Jacket (1987), sa vision de la guerre du Vietnam. Le cinéaste culte s’inspire ici du roman de Gustav Hasford (Le merdier) pour livrer un film troublant qui se décompose en deux parties: l’entraînement et le baptême du feu d’un groupe de jeunes marines volontaires. Dans la première moitié de son film, Kubrick détaille et analyse la formation de ces jeunes soldats. Ils vont subir un véritable lavage de cerveau à coups d’humiliations et de punitions infligées par le redoutable et cruel sergent Hartman, incarné par un authentique instructeur militaire (R. Lee Ermey). Kubrick dénonce avec sa maestria coutumière la dureté et l’imbécillité de la discipline militaire, plus particulièrement en montrant le calvaire du soldat Léonard, alias «Grosse Baleine», méconnaissable Vincent D’Onofrio (New York section criminelle). Dans la seconde partie, Kubrick met en scène la guerre elle-même, par le prisme de ces marines à présent endoctrinés, jusqu’à la sanglante offensive du Têt, à Huê, en 1968. Le cinéaste s’attarde sur la psychologie des personnages au lieu des habituels sentiments guerriers. Avec finesse et subtilité, il met en lumière les profondeurs de l’âme de ces soldats formatés pour tuer au nom d’un pays et offre un aperçu de la cruauté et la bêtise dont l’homme est capable. Un véritable voyage au bout de l’enfer.

Disponible avec la Collection Stanley Kubrick sur Salto

On peut voir

Sacrées Sorcières, des souris et des femmes

Le cinéaste de Retour vers le futur et Forrest Gump laisse à nouveau parler son âme d’enfant avec cette adaptation du roman de Roald Dahl, déjà porté à l’écran en 1990 par Nicolas Roeg. Dans cette nouvelle version moins gothique et plus burlesque initiée par Guillermo del Toro avant qu’il ne passe la main à Zemeckis, l’intrigue ne se déroule plus en Angleterre des années 1980 mais dans l’Alabama des années 1960 tout juste sorti de la ségrégation. Anne Hathaway succède à Anjelica Huston pour camper une sorcière décidée à transformer les enfants en souris grâce à des bonbons ensorcelés. Seul un astucieux petit garçon afro-américain et sa grand-mère poule (Octavia Spencer) qui logent dans le même hôtel peuvent empêcher le désastre. Malgré un accent d’Europe de l’est improbable et des effets spéciaux criards, Anne Hathaway s’amuse beaucoup en créant une magicienne fashion victim qu’on dirait sortie du Diable s’habille en Prada. Ses escarmouches avec Spencer, dont les principaux partenaires sont des rongeurs animés en trois dimensions, font tout le sel de ce conte.

Disponible en DVD et VOD

À éviter

La Fille du train, avec modération

Chaque jour, Emily Blunt prend son train de banlieue, car elle fait semblant de travailler à Manhattan. À un moment précis du trajet, elle observe un couple pour catalogue de vente par correspondance. Elle est blonde. Lui est vaguement brun. Ils s’enlacent en plein air. Quand elle est toute seule, la femme s’accoude à la balustrade en petite tenue. Un matin, la pauvre Emily l’aperçoit en train d’embrasser un autre homme. Elle bouscule les passagers. Son univers s’effondre. Ça n’allait déjà pas très fort. Elle ne supportait pas que son mari l’ait quittée pour une autre. Salaud de Justin Theroux! Il a désormais un bébé avec sa nouvelle épouse. Les services d’une nounou blonde ont été nécessaires. Elle ne s’occupera pas seulement du nourrisson, si vous suivez mon regard. C’est comme ça qu’on disparaît un soir en faisant son jogging. Il ne faut pas oublier de préciser que tout ce petit monde habite dans les bâtisses que longent les rails. Les invraisemblances se ramassent à la pelle. C’est l’automne qui veut ça. Pour ne pas être en reste, Emily est une alcoolique sévère. Ses heures se déroulent dans un épais brouillard. Elle a sans cesse un gobelet à la main. Il ne contient pas exactement du café. Des images l’assaillent. A-t-elle assisté à un meurtre? Ceux qui ont lu le best-seller de Paula Hawkins connaissent la fin de l’histoire. Les autres la devinent très vite. Les auteurs – ce mot devrait être interdit, en ce qui les concerne – ont transposé l’action de l’Angleterre aux États-Unis. Que boit Miss Blunt, à longueur de bobine? Gin ou vodka? C’est sans doute l’unique suspense de ce film à consommer avec une infinie modération.

Disponible sur Amazon Prime Video

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