Une étude pointe une erreur de datation des spécimens les plus récents de l’Homme de Néandertal retrouvés en Belgique.
La grotte de Spy est un site paléolithique majeur de la Wallonie. Découvert avec grand bruit en 1886, le site préhistorique regorge de silex taillés, d’ossements d’animaux les plus divers – du cerf au mammouth – et de squelettes appartenant à nos lointains cousins, les Néandertaliens, dont plusieurs groupes occupèrent la grotte de Spy à plusieurs générations d’intervalle. Analysés à de nombreuses reprises, plusieurs des spécimens de Spy seraient parmi les derniers Hommes de Néandertal connus, avec des datations courant jusqu’à 23 800 ans avant notre ère. Une chronologie que réfute une nouvelle étude publiée dans le dernier numéro de la revue scientifique Pnas .
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« Les précédentes datations tirées des spécimens néandertaliens de Spy étaient trop récentes de jusqu’à 10 000 ans en raison de la présence de résidus contaminés » clame l’étude en question menée par une équipe internationale et pluridisciplinaire. Très délicate, l’analyse au carbone 14 des échantillons permet d’établir une chronologie très précise et absolue, mais à condition que l’objet analysé n’ait pas été au préalable contaminé par le sol ou d’autres éléments. Afin de s’assurer une fiabilité incontestable à leurs analyses et de réduire drastiquement leur marge d’incertitude, les scientifiques ont mis au point une nouvelle méthode censée éviter toute contamination extérieure, a expliqué à l’AFP l’un des co-auteurs de l’étude, Thibaut Devièse de l’Université d’Oxford et Aix-Marseille.
Plutôt que de juste extraire le collagène organique des os – dont le mauvais état rend souvent impossible une datation radiocarbone -, l’équipe de Thibaut Devièse a décidé d’aller « plus loin », en travaillant au niveau moléculaire, sur des acides aminés tirés du collagène du Néandertalien wallon. Après avoir complété leur analyse du spécimen de la grotte de Spy avec celle de deux autres squelettes belges – extraits des sites de Fonds-de-Forêt et d’Engis – les différents membres de l’équipe ont pu conclure que l’Homme de Néandertal a « disparu du nord-ouest de l’Europe entre 44 200 et 40 600 avant le présent (avec une probabilité de 95,4 %), soit beaucoup plus tôt que ce qui avait été suggéré auparavant. »
« Près de deux siècles après la découverte de l’enfant néandertalien d’Engis, nous avons été capables de lui donner un âge fiable, a déclaré à l’AFP Thibaut Devièse. Dater tous ces spécimens de Belgique était très enthousiasmant, car ils ont joué un rôle majeur dans la compréhension et la définition de l’Homme de Néandertal. » Comme le rappelle l’étude, il existe néanmoins des traces d’une survivance plus longue des Néandertaliens dans d’autres régions. Comme le rappelle Thibaut Devièse, tout est en fin de compte une question d’outils : « La datation est cruciale en archéologie, car sans un cadre fiable de la chronologie, on ne peut être sûrs de comprendre les relations entre le Néandertalien et l’Homo sapiens. »
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