Eurockéennes, Vieilles Charrues, Solidays… Les festivals d’été dans le brouillard


La ministre de la Culture a annoncé jeudi une jauge réduite à 5000 spectateurs assis pour les festivals qui maintiendront leur édition cet été.

Les festivals sont en berne. Après une année blanche pour le monde de culture, les nouvelles restrictions annoncées par la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, imposant une jauge à 5000 personnes assises maximum, interrogent les organisateurs de festival. «On est sous le choc, dos au mur», lance Jean-Paul Roland, directeur du festival des Eurockéennes et représentant du Prodiss (Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle dans le privé) à l’AFP. À la suite de cette annonce, le patron a sondé son public, seul arbitre fiable dans cette bataille. « Les réponses sont claires, 85% des sondés ont dit qu’ils ne viendraient pas si c’était un festival assis», se désole-t-il.

«C’est 5000 personnes, assises, et avec distanciation, sans distinction entre plein air et intérieur! Ça veut dire qu’il faut des gradins de 10.000 places…», continue Jean-Paul Roland, avant d’ajouter que son festival ne prendrait aucune décision avant d’en parler avec d’autres festivals. Avec des programmations édifiantes, qui réunissent à l’affiche des artistes comme Muse, DJ Snake ou encore Massive Attack, difficiles néanmoins de s’adapter à une configuration assise. « Quel artiste accepterait? », questionne le directeur. Idem pour le grand rassemblement de hard rock le Hellfest, aux 180.000 festivaliers en 2019. Ce vendredi, le créateur de l’évènement a affirmé au micro de l’AFP qu’«une annulation du festival semblait inévitable », assurant qu’il ne pourrait tenir « 5.000 metalleux assis et distanciés, ce n’est pas possible».

À l’inverse, le festival des Vieilles Charrues (du 15 au 18 juillet), qui a réuni 270.000 spectateurs il y a deux ans, compte bien saisir la perche. « On s’adaptera. Ce ne sera pas un été silencieux à Carhaix, ce sera l’été des retrouvailles », confie son directeur Jérôme Tréhorel. Jean-Paul Roland des Eurockéennes rejoint son homologue sur ce point : « Je craignais beaucoup qu’il n’y ait pas d’annonce du tout ou que les festivals d’été soient interdits. Nous pourrions très bien passer en configuration debout si la situation sanitaire s’améliorait », s’enthousiasme-t-il encore dans un élan d’espoir.

Zones floues

« On en sait un peu plus pour le cadre général, mais il reste des zones de flou. Ce qui est sûr c’est que la saison des festivals 2021 ne sera pas comme les autres », juge de son côté Aurélie Hannedouche du Syndicat des musiques actuelles (SMA). Parmi les zones grises, elle pointe la question de l’autorisation des zones bar/restauration qui dépendra de la réouverture « dans le secteur de la restauration ». « Nous avons envie d’organiser nos festivals cet été, mais pas à n’importe quel prix. Nous attendons une parole forte du Président ou du Premier ministre qui s’engage sur la reprise du secteur culturel », insiste-t-elle.

La ministre de la Culture a réagi à ces interrogations au micro de BFM TV, précisant qu’une enveloppe à hauteur de 30 millions d’euros servirait à accompagner les festivals vers des formats alternatifs ou à les aider en cas d’annulation. « Mais si c’est 30 millions pour toutes les esthétiques (genres musicaux) et si on compte 6000 festivals en France, ça fait 5000 euros par festival…», s’inquiète Mme Hannedouche. Roselyne Bachelot a assuré qu’il s’agissait «d’une première salve» et que cette enveloppe serait «réalimentée s’il y en a besoin ».

Le festival Solidays , qui avait pourtant dévoilé sa programmation début janvier en signe d’espoir, a annulé son édition. L’évènement aux 228.000 spectateurs en 2019, qui finance chaque année des actions de Solidarité Sida a préféré jeter l’éponge pour cette année.

Trois soirées à 20.000 personnes

D’autres mastodontes déplorent les nouvelles restrictions du gouvernement tout en s’en réjouissant. Pour les organisateurs de la Nuit de l’Eure (à Nort-sur-Erdre), qui doit se dérouler du 25 au 27 juin, « trois soirées à 20.000 personnes n’auront pas lieu», ce qui engendrera encore cette année une grosse perte sur les recettes de l’évènement. «En revanche, nous allons réfléchir tous ensemble à imaginer des concerts à 5000 spectateurs. Si c’est jouable, on travaillera dessus», a indiqué l’équipe du festival à Ouest-France.

Idem pour le festival de Poupet en Vendée. «Sur nos 14 soirées prévues, j’annule d’ores et déjà deux événements rap qui devaient accueillir entre 15 et 20.000 spectateurs. Pour toutes les autres, nous allons proposer des concerts à 5000 personnes assises » a expliqué Philippe Maindron, son président, au quotidien rennais.

Cette nouvelle configuration douche inévitablement les espoirs de grandes fêtes cet été. Mais alors que les festivals s’étaient pour la plupart résignés à annuler leur édition 2021, ces nouvelles restrictions en sauveront quelques-uns. Une initiative pour laquelle ils restent reconnaissants.

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