À la recherche des chênes pour reconstruire la flèche de Notre-Dame


Des experts forestiers parcourent en ce moment la France pour sélectionner des arbres centenaires, voire bicentenaires. Le temps presse afin de respecter le délai fixé par Emmanuel Macron pour la fin des travaux de restauration de la cathédrale, en 2024.

Ils sillonnent en ce moment le massif de Conches et Breteuil, dans l’Eure, à la recherche de chênes. Les forestiers ont besoin qu’ils soient centenaires. Pour une cathédrale millénaire. Leur mission ? Trouver les plus beaux spécimens pour la reconstruction de la flèche de Notre-Dame, ravagée par le terrible incendie de 2019.

Les arbres sont choisis en fonction de leurs mensurations (taille, diamètre) et de leur qualité. Des «arbres de grosses dimensions de 50, 60, 80 ou 90 cm de diamètre et de 8 à 14 mètres de hauteur», a détaillé à France Inter François Hauet, expert forestier à Louviers. Dans le jargon forestier, on dit qu’il faut que ces chênes soient «conduits», c’est-à-dire qu’ils soient bien longs et droits.

Le temps presse pour remettre la célèbre flèche de Viollet-le-Duc en apesanteur avant fin 2024, comme en a décidé Emmanuel Macron. Les troncs devront être sciés et rester au sec pendant 12 à 18 mois. Pour se faire, les arbres sélectionnés seront abattus avant la montée de la sève, soit à la fin de ce mois de mars.

«Il s’agit de l’héritage d’une sylviculture ancienne, pas des arbres de 20 ans mais des arbres très anciens. Y compris des plantations décidées par d’anciens rois pour réaliser des constructions navales et assurer la grandeur de la flotte française», explique au Parisien Dominique de Villebonne, directrice adjointe de l’Office national des forêts (ONF).

Philippe Gourmain, expert forestier, membre de France Bois Forêt et coordinateur de la récolte des arbres, abonde : «C’est un peu une histoire de France naturelle qu’on va utiliser pour refaire cette charpente historique.» Pour la charpente complète, il faut un millier d’arbres et les recherches des plus beaux spécimens devraient se poursuivre dans le Perche.

Sandra Plantier, professeure agrégée de géographie et auteure d’une tribune pour Reporterre, voit dans ce chantier une aberration. «Ces mille arbres âgés d’une ou plusieurs centaines d’années sont autant de cathédrales pour la biodiversité de nos forêts que l’on s’apprête, pour les premiers, à abattre au tout début du printemps, alors même qu’y nicheront sans doute déjà oiseaux et écureuils», écrit-elle sur le site de cette publication spécialisée. Selon elle, cet «édifice de pierre offert à Dieu» symbolisait «d’une certaine manière aux XIIe et XIIIe siècles la supériorité de l’homme sur la nature». Une pensée d’un autre d’âge selon elle.

L’Office National des forêts se veut plus rassurant quant à la responsabilité environnementale de ses prélèvements. «En parallèle de ces arbres coupés, nous laissons d’autres vieillir très longtemps, assure Dominique de Villebonne. Et nous en plantons d’autres pour que les générations suivantes puissent elles aussi créer des œuvres d’exception.»

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