Denis Huisman, créateur du prix Roger Nimier, est mort


L’auteur du célèbre Manuel de philosophie est décédé ce mercredi 3 février. Il avait 91 ans.

«C’était un homme d’une immense culture. Il était très courtois, très discret, comme s’il voulait se faire pardonner ses innombrables connaissances.» Des mots de l’académicien Jean-Marie Rouart, qui l’a bien connu à la présidence du prix Nimier, Denis Huisman était un grand monsieur. De ceux, qui ne cherchaient ni la provocation, ni la complication mais avaient pour philosophie, une vie simple.

«La philosophie», l’amour de la sagesse, était son maître-mot. N’est-ce pas lui qui éveilla des générations de lycéens à la philosophie avec son fameux Manuel coécrit avec André Vergez? Denis Huisman était un humaniste. Il avait la passion de la transmission et de la vulgarisation. «Le défaut, confiait-il au Figaro il y a moult années, c’est de voir des spécialistes écrire pour les spécialistes. Je préconise que l’on parle un langage plus simple pour gagner à la philosophie un public qu’elle a perdu ces vingt dernières années.» Denis Huisman est mort ce mercredi 3 février à l’âge de 91 ans.

Une philosophie humaniste

Il était né un 13 avril 1929 dans le 16e arrondissement de Paris. Brillant, l’élève fit d’abord ses études au lycée Montaigne, puis Claude-Bernard avant de rejoindre Henri-IV. Suivirent alors la faculté des lettres de Paris et l’IEP au sein de la capitale, qui lui donnèrent une licence de philosophie, une maîtrise ès lettres puis le statut de docteur d’Etat ès lettres.

D’abord professeur aux lycées Turgot, Charlemagne puis Montaigne, il devint chargé de cours à l’Institut d’art d’archéologie de l’université de Paris, à l’Ecole alsacienne, au collège Sainte-Barbe au début des années 1950. Chemin faisant, il occupa également le poste de chargé de mission au cabinet d’Edgar Faure en 1958. Le curriculum vitae impressionnant déborde outre-Manche et outre-Atlantique. En 1961, Denis Huisman créa l’Ecole française des attachés de presse, dite aujourd’hui EFAP.

L’école lui a accordé un portrait dans lequel on peut lire cette citation: «Sans fausse modestie, j’étais un bon prof qui se souciait prioritairement de la réussite de ses élèves. La plupart de mes collègues voulaient transmettre leur passion aux premiers de la classe. Mais les élèves les plus brillants n’ont pas besoin de pédagogie. Moi, mon but, était de faire réussir le bac aux élèves moyens!» Toujours guidé par son ambition humaniste, et non jamais élitiste, en 1963, il devint président-fondateur de l’Institut supérieur des carrières artistiques (suivent en 1967 l’École française du marketing, dite École de management de Paris, puis en 2004, l’École française du journalisme). La même année, Denis Huisman cocréa, avec André Parinaud, le prix Roger-Nimier. Un «prix qui récompense un jeune auteur dont l’esprit s’inscrit dans la lignée de l’œuvre littéraire de Roger Nimier». Déferlèrent Modiano, Cioran, Orsenna, Tillinac, Garcin, Adrien Goetz, Pierre Adrian ou bien encore Arnaud de La Grange… Ainsi, comme se le rappelle Jean-Marie Rouart, «il connut la terre entière».

Un professeur discret

Avec son Manuel de philosophie coécrit avec André Vergez, l’homme de l’ombre passa malgré lui à la lumière. L’ouvrage dans lequel «toutes les grandes questions que l’on a pu se poser au cours des 2 500 ans qui séparent Socrate de Sartre, sont soulevées dans ce livre simple et bien documenté» devint le livre de millions de lycéens des années 60, et durant de nombreuses décennies. Mais Denis Huisman resta discret. «C’était un professeur de philosophe qui ne se prenait pas pour un philosophe», se souvient Jean-Marie Rouart.

Dans les années 1970, il devint, sans être trop exhaustif, directeur de collections aux éditions Bordas, Sedes, Nathan, Hachette ; producteur à l’ORTF et à TF1 des émissions les Grands problèmes de la psychologie, Interrogations, les Idées et les hommes ; Secrétaire général du prix et des Cahiers Roger Nimier ; Président du Salon de Paris… Denis Huisman écrivit sur l’art, la communication, la réussite scolaire et bien sûr, la philosophie.

En 1997, à l’occasion de la sortie de Socrate sur internet, il expliquait au Figaro Littéraire: «Je crois qu’il existe un besoin de philosophie, inhérent à l’homme. Si on présente la philosophie de manière romancée, on s’aperçoit qu’il y a un besoin réel de réflexion dans le grand public.» Et de préciser, lui qui n’aimait décidément pas les projecteurs: «Il faut toujours redouter les philosophes qui se prennent au sérieux. Le maître mot reste celui de Pascal: «Se moquer de la philosophie, c’est vraiment philosopher.»

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