Soul, «un film initiatique sur le bonheur», selon Camille Cottin et Omar Sy


INTERVIEW VIDÉO – Les comédiens prêtent leurs voix au récit métaphysique de Pixar. Une lettre d’amour à la vie et au jazz des plus opportunes pour refermer une année bouleversée par le coronavirus.

« Soul est un film dont vous ressortirez plus léger, un récit initiatique sur le bonheur des choses simples, de l’amitié, de l’instant présent», garantit Camille Cottin au Figaro. La vedette de Dix pour cent prescrirait volontiers le dernier opus de Pixar auquel elle prête sa voix pour se requinquer et se ressourcer après une année 2020, placée sous le signe du coronavirus et du confinement. Prévue pour une sortie au cinéma en juin 2020, cette exploration vertigineuse et poétique de notre humanité, qui a obtenu le label Cannes 2020, débarque, fermeture des salles oblige, sur la plateforme Disney +, vendredi 25 décembre.

Signées du spécialiste Pete Docter, réalisateur de Là-Haut et Vice Versa, les tribulations du musicien de jazz Joe, doublé par Omar Sy, et de la rebelle et punk petite âme 22, à laquelle Camille Cottin insuffle toute sa facétie et joie de vivre, amèneront dans votre salon une vraie leçon de métaphysique, d’une mélancolie et profondeur inattendues, que petits et grands apprécieront chacun à leur niveau.

Soul met en scène un pianiste new-yorkais, Joe. Peinant à vivre de son art, il s’est résigné, dépité, à gagner sa vie en enseignant la musique à des lycéens distraits. Faire carrière semble un mirage désespérément lointain jusqu’au jour où un ancien élève le recommande à une artiste de jazz emblématique de la Grosse Pomme. Las, Joe a à peine triompher de son audition qu’il chute dans une bouche de caniveau. Il se réveille dans un monde étrange, celui d’avant notre naissance. Dans ce lieu sont assemblées les âmes qui attendent de voir le jour. Pour retrouver sa réalité, Joe va devoir convaincre la sarcastique âme 22 de trouver sa vocation et de rejoindre le monde des vivants. Un exploit que ni Mohamed Ali, Mère Thérésa ou Platon, mentors dans l’au-delà n’ont réussi.

«22 ne voit pas l’intérêt de vivre», souligne Camille Cottin. «C’est une nihiliste qui s’entendrait parfaitement avec Nietzsche, alors que Joe est un existentialiste, persuadé d’être né pour un grand destin prédéfini», résume Pete Docter. L’idée de Soul lui est venue en pleine interrogation existentielle : « Pendant de longues années, j’ai mis toute mon énergie et ma passion dans l’animation mais cela ne suffisait pas à me combler. Je me suis alors demandé : existe-t-il un moyen, meilleur qu’un autre, de vivre sa vie ?».

Picasso, Calder et Brancusi

À l’image de ces questionnements existentiels, Soul repousse les limites graphiques de Pixar dans l’abstraction, notamment quand il s’agit de dépeindre ce «Grand Avant» où vivent les âmes en devenir. Les responsables de l’endroit, de grands épouvantails nommés Michel, font furieusement penser à la créature esquissée d’un simple trait blanc par l’Italien Osvaldo Cavandoli, et dont les aventures sur une feuille de dessin faisaient tout le sel du dessin animé La Linea. Pete Docter cite volontiers dans ses recherches l’influence de Picasso, Calder ou Brancusi. Les Michel règnent sur un vaste campus où règnent une élégance et une perfection mathématique. À rebours le New York de Joe est chaleureux et vibrant de familiarité. Les documentalistes de Soul ont arpenté le Queens et ses écoles,et fanfares.

Pour être heureux, vous n’avez pas besoin de réussir et de briller à tout prix. Vous pouvez être vous.

Pete Docter

Musicalement, le style de Joe « se rapproche d’Herbie Hancock, dont les mélodies ont souvent été reprises dans des titres de hip-hop qui parleront aux plus jeunes spectateurs». À ceux-ci, le cinéaste espère que Soul montrera une autre voie : « Je voulais au mitan de ma vie réexaminer la pression que je m’étais imposée. 22 parle beaucoup aux ados et aux jeunes adultes qui se demandent comment trouver leur place dans la société , qui sont assaillis de doutes. Soul montre que pour être heureux, vous n’avez pas besoin de réussir et de briller à tout prix. Vous pouvez être vous. Le monde est empli de beauté. Le jazz était une métaphore musicale évidente : c’est le royaume de l’improvisation sans partition, comme la vie».

Le réalisateur est le premier étonné de voir à quel point ce projet, commencé il y a quatre ans, trouve des échos en notre situation actuelle : «Joe ne voit pas les choses formidables qu’il a sous son nez jusqu’à ce qu’elles soient hors d’atteinte, comme ce café que l’on prenait et sirotait au coin de la rue».«Soul arrive au bon moment et pose les bonnes questions. Il montre que l’accès au bonheur n’a pas à être celui dicté par le monde, renchérit Omar Sy. Les maux de notre époque ne sont pas seulement liés à la pandémie, mais aussi à notre manière de nous regarder, de nous juger, de nous préjuger.» Et de retenir plein d’espoir : «Soul fait l’éloge de la transmission. Ce qui manque peut-être à notre époque où l’on pioche des références à droite et à gauche, ce sont des mentors prêts à nous guider».

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