Les souvenirs de danse dans l’œil de Dominique Delouche


Si vous aimez la danse (mais qui n’aime pas la danse !), voilà un petit livre qui vous passionnera. Signé par le réalisateur Dominique Delouche, sans doute l’un des plus fins observateurs de l’art chorégraphique en France, cet ouvrage retrace la belle histoire de la danse du XXe siècle. Ancien assistant de Fellini, Delouche est resté toute sa vie marquée par le souvenir de sa visite au Palais Garnier, lorsque qu’en pleine guerre et dans un Paris occupé par les Allemands, ses parents l’emmenèrent voir le Ballet de l’Opéra de Paris dont Lifar était le maître. Il avait 11 ans. Ce fut un coup de foudre. On ne s’en étonne pas quand il raconte son enfance proustienne où, garçon solitaire et touche à tout, il préférait pratiquer le piano et le dessin tandis que ses camarades jouaient au football. Longtemps alité à cause d’une mauvaise pleurésie, il passa sa convalescence loin de Paris, à la montagne. À son retour, il n’eut plus qu’un appétit : dévorer films et spectacles. Puis, inscrit au cours préparatoire de cinématographie au lycée Voltaire à Paris, il finira par rencontrer Fellini au Festival de Venise en 1954. C’est ainsi qu’il devint l’assistant du génial réalisateur romain, le temps de trois films.

Après la Dolce Vita, Dominique Delouche décide de voler de ses propres ailes. En 1959, il réalise son premier film … sur la danse. Le Spectre de la danse connaît un succès immédiat. Pour le rôle principal il avait pensé à la ballerine Yvette Chauviré, mais terrorisée par la caméra, elle déclina l’offre de peur « d’être démasquée ». Ce fut donc Nina Vyroubova qui fut choisie. Il faut souligner l’originalité de cette démarche cinématographique. Au début des années soixante, la danse était circonscrite à la scène. En la portant à l’écran, Dominique Delouche fut l’exception parmi les réalisateurs de l’époque. Au fil des années, il réalisera ainsi plus d’une vingtaine de films consacrés à cet art. Ils restent des témoignages précieux de cette danse flamboyante que connut la deuxième partie du XXe siècle.

Dans l’appartement où il est né, dans le XVIe arrondissement de Paris et où il vit encore, Dominique Delouche nous a reçus avec générosité. Avec nous, il a jeté un regard attendri sur cette grande époque qui a initié la démocratisation de la danse en la sortant des temples qu’étaient pour elle les théâtres et les opéras. C’est à ce moment précis de l’histoire qu’elle s’est ouverte au monde, avec des chorégraphes comme Béjart qui l’ont introduite dans les palais des sports. Ce qui singularise les films de Dominique Delouche c’est qu’ils ne se résument pas à des captations de spectacles mais montrent la danse dans sa genèse : comment elle se prépare, comment on la répète, comment on monte un ballet… Bref les coulisses de toute une chorégraphie, celle que le spectateur ne peut pas voir et surtout n’imagine pas. C’est aussi ce que nous donne à voir ce livre radieux.

La Danse, le désordre et l’Harmonie, 150 pages, Orizons

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