«L’Européen a tort de visiter les villes américaines comme on visite Paris ou Venise»


LES ARCHIVES DU FIGARO – En 1945, le département d’État américain invite quelques journalistes français à découvrir les États-Unis. Pendant huit semaines, l’auteur de L’Être et le Néant est transporté aux quatre coins du pays, de New York à La Nouvelle-Orléans ou San Francisco, à la découverte du pays et de ses habitants.

Jean-Paul Sartre (1905-1980), écrivain et philosophe français, ici a son bureau rue Bonaparte à Paris, vers 1955.
Jean-Paul Sartre (1905-1980), écrivain et philosophe français, ici a son bureau rue Bonaparte à Paris, vers 1955. Rene Saint Paul/©Saint Paul / Bridgeman images

Ce qui frappe surtout dans les cités américaines, c’est le désordre en hauteur. Ces bicoques de brique sont de taille inégale: un étage, deux étages, un étage, un étage, trois étages, voilà des proportions notées au hasard d’une promenade à Détroit. Vous retrouverez les mêmes à l’autre bout du pays, à Albuquerque ou à San Antonio. En profondeur, au-dessus de ce crénelage irrégulier, on aperçoit des immeubles de toutes formes et de toutes dimensions, longs étuis, épaisses boîtes de trente étages, à trente, à quarante fenêtres par étage ; dès qu’il y a un peu de brouillard, les couleurs s’évanouissent. Il ne reste que des volumes, toutes les variétés de polyèdres. Entre eux, des vides énormes, des terrains vagues découpés dans le ciel.

À New York, à Chicago même, le gratte-ciel est chez lui, il impose un ordre nouveau à la ville. Mais partout ailleurs il est déplacé: l’œil ne peut établir aucune unité entre ces grandes asperges et les maisonnettes qui courent à ras du sol: il cherche malgré

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