Ida Haendel, éternelle étoile du violon, s’est éteinte


Elle aura été l’une des rares femmes violonistes de sa génération à accéder à un tel niveau de notoriété. Ida Haendel s’est éteinte le 30 juin à Miami (où elle résidait), à l’âge de 91 ans… Tout au moins si l’on en croit son autobiographie, Woman with a violin, parue en 1970. Car selon la légende, le certificat de naissance que son père produisit en 1936, pour son premier concert au Queen’s Hall de Londres, ne mentionnait pas le 15 décembre 1928 mais le 15 décembre 1923. L’artiste, élevée au rang de Commandeur de l’ordre de l’empire britannique en 1991, est toujours restée évasive sur le sujet.

Qu’importe ! Qu’elle nous ait quittés à l’âge de 91 ou de 96 ans, Ida Haendel restera pour de nombreux mélomanes, après 70 ans de carrière, synonyme d’éternelle jeunesse de l’interprétation musicale. Elle était née Hendel, à Chelm, en Pologne. Son père Nathan, portraitiste mais grand amateur de violon lui-même, l’avait encouragée dès ses trois ans dans la pratique de l’instrument.

Après avoir impressionné le célèbre violoniste polonais Bronisław Huberman, qui reconnut en elle une enfant prodige, puis Joseph Szigeti qui l’invita à venir étudie avec lui à Paris, c’est finalement à Londres que se jouèrent ses années d’apprentissage, auprès de Carl Flesch.

En 1935, sa participation au concours Wienawski, l’année où Ginette Neveu gagne la compétition devant le Russe David Oïstrakh, lui offre une large exposition médiatique, et la propulse sur le devant des scènes internationales. Mais c’est en Angleterre, sa patrie d’adoption à laquelle elle restera toujours attachée, qu’elle fait l’essentiel de sa carrière. Même après son installation à Miami en 1979, elle réalise d’incessants allers-retours entre Londres et les États-Unis.

Aisance technique et lyrisme

Après son récital de 1936, elle y entame dès 1940 une fructueuse collaboration avec Decca. Après avoir joué pour les troupes britanniques et américaines pendant la guerre, elle est soutenue dès 1948 par le producteur Walter Legge, figure tutélaire du label His Master’s Voice chez EMI, qui lui fait réaliser ses premiers enregistrements de concertos, avec des personnalités telles que Rafael Kubelik, puis Sergiu Celibidache. Elle nouera avec ce dernier de profondes relations d’amitiés et d’évidentes affinités musicales.

En 1949, la disparition de Ginette Neveu la laisse comme l’une des seules femmes violonistes à la carrière internationale de l’époque. Mais la réduire à cela serait un raccourci malheureux. Car son succès, c’est d’abord à son jeu, mélange d’aisance technique et de lyrisme, qu’elle le doit. En 1949, le compositeur Sibelius, l’entendant jouer son propre concerto à la radio, se fend d’une lettre de félicitations qu’elle gardera comme un trésor.

Car si elle n’hésite pas à se mesurer aux grands opus du répertoire, Ida Haendel est aussi une ambassadrice majeure pour la musique du XXe siècle. A fortiori la musique anglaise. En témoignent ses interprétations nombreuses et engagées des concertos de Britten, Elgar ou encore Frankel. Jusqu’aux années 1990, elle aura participé aux Proms de Londres pas moins de 68 fois. Elle a également créé le concerto Tartiniana Seconda (hommage au compositeur baroque Giuseppe Tartini) de Dallapicola, ainsi que le concerto n°2 de Petterson.

En 2006, elle était retournée en Pologne jouer à Chelm, sa ville natale, pour le 75e anniversaire de son tout premier concert en public, ainsi que pour une visite apostolique du Pape Benoît XVI dans le camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau. L’une de ses toutes dernières apparitions en concert date de 2010, à la National Gallery de Londres, pour commémorer la Seconde Guerre Mondiale.

Mais la violoniste n’avait jamais cessé de jouer, malgré son âge… Fût-il de 91 ou de 96 printemps.

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