La Penny Lane des Beatles sera-t-elle débaptisée à cause d’un esclavagiste du XVIIIe siècle?


Si Paul McCartney avait su les turpitudes actuelles visant Penny Lane, aurait-il tout de même composé sa célèbre ballade nostalgique contant ses souvenirs d’enfance à Liverpool? Aurait-il raconté de la même manière l’histoire de ce barbier qui collectionne les photos de tous ceux qu’il a rencontrés? Et ce banquier qui ne met jamais d’imperméable alors qu’il pleut à verse, ou encore ce pompier qui passe son temps à nettoyer son camion rutilant?

«Penny Lane reste dans mes oreilles et dans mes yeux/Là sous les cieux bleus de la banlieue/Je m’assieds et je prends du recul» chantait naïvement l’ex-Beatles en 1967 dans le célèbre morceau issu de l’album Magical Mystery Tour. C’est peut-être de ce recul dont auraient bien besoin en ce moment tous ceux qui veulent rebaptiser le nom de cette route du sud de Liverpool, parce qu’elle serait liée à James Penny, le propriétaire d’un navire négrier du XVIIIe siècle.

Ainsi, quatre plaques de rue été recouvertes de peinture à la bombe et le terme «raciste» a été inscrit sur le mur au-dessus de l’une d’elles. Elles ont été nettoyées vendredi. Ces dégradations interviennent au moment où le mouvement de protestation contre les références à l’héritage colonial enfle au Royaume-Uni, dans le sillage de l’indignation mondiale causée par la mort de George Floyd, tué par un policier blanc aux États-Unis.

La polémique fait rage ces derniers jours à Liverpool, mais selon son maire Joe Anderson, il n’est pas prouvé que la rue ait été ainsi nommée pour faire référence au marchand d’esclaves James Penny. Selon un porte-parole du musée international de l’esclavage de Liverpool, le débat existe, «mais les preuves ne sont pas du tout concluantes.» Un élu local, Richard Hemp, affirme quant à lui que le nom de l’esclavagiste s’écrivait Penney et que cette rue existe «depuis plus de 500 ans, avant Penney, avant l’esclavage.» Selon lui, «ça n’a rien à voir.»

Le maire de Liverpool refuse donc bec et ongles de changer le nom de la rue Penny Lane, même après avoir pris connaissance de ces allégations. Dans le Daily Mail , Joe Anderson a déclaré qu’il n’y avait aujourd’hui « aucune preuve » soutenant l’affirmation selon laquelle la Penny Lane rendue célèbre par les Beatles route soit liée à James Penny, ce marchand et anti-abolitionniste ayant acquis sa richesse en étant esclavagiste.

Qui plus est, Penny Lane n’a pas été inclus dans la liste de dizaines de statues, noms de rues et autres œuvres d’art que les manifestants de Black Lives Matter demandent que l’on supprime en raison de leurs liens avec la traite des esclaves.

L’affaire a débuté lorsqu’un internaute a mis le maire au défi de prendre «l’audacieux pari» de changer le nom de Penny Lane. Joe Anderson a alors répondu qu’il n’y avait «aucune preuve que Penny Lane puisse porter le nom du marchand d’esclaves James Penny», affirmant que cette dénomination venait plutôt d’un pont à péage historique «ayant coûté un sou» (un « penny »). Et il a ajouté: «Nous travaillons de concert avec les communautés des minorités ethniques, ainsi qu’avec des historiens afin d’examiner tout cela ans les règles. »

Aujourd’hui, en Grande Bretagne, pas moins de 72 monuments commémoratifs honorant des figures coloniales sont menacés de destruction par les militants sur leur site Web « Topple the Racists » (littéralement «Renverser les racistes»).

Le week-end dernier, des manifestants de Black Lives Matter ont démoli la statue du marchand d’esclaves Edward Colston et l’ont roulée dans le port de Bristol.

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