Il y a un peu plus d’un an les Blazers vivaient une nouvelle soirée cauchemar. Trente-cinq ans après avoir loupé Michael Jordan, douze ans après avoir drafté Greg Oden, neuf ans après avoir découvert l’arthrite de Brandon Roy et quelques mois avant d’embaucher Mario Hezonja. Tant de tragédies auxquelles la fracture tibia-péroné du pivot bosnien vient s’ajouter, car à Portland il y a une logique à respecter, et cette logique fout clairement la gerbe.
Et dans la même collection :
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En NBA, Jusuf Nurkic est un cas particulier. Tout d’abord en couveuse à Denver et montrant de belles dispositions à partir de la saison 2016-17, le pivot bosnien était pourtant… de trop dans le Colorado, car dans le même temps un autre géant venu des Balkans commençait à développer de sacrés skills, catégorie du dessus comme on dit. Il a donc fallu faire un choix et Jusuf s’en est allé du côté de Portland, laissant à Nikola Jokic l’intégralité de la raquette et de la lumière chez les Nuggets. Depuis ce jour ? Ex-plo-sion. Car très vite, celui qui était jusque-là considéré comme un facteur X un peu zinzin va prouver qu’il peut dominer avec un grand P, et que la brute épaisse qui laisse parfois son cerveau sur le banc est aussi capable d’être un joueur exemplaire. 15 points, 10 rebonds et 3 passes par match dès son arrivée dans le nord-ouest, et très vite un rôle incontestable de pivot titulaire grâce à un abattage incroyable des deux côtés du terrain. Dégaine de videur de boîte mais Qi basket bien développé, des airs de taffeur de l’ombre mais de vraies perfs et notamment ce 24/23/7/5/5 en janvier 2019, performance quasiment unique dans l’histoire de la Ligue. A 24 ans Jusuf donne désormais la pleine mesure de son talent et avec oui c’est tout Portland qui étonne et qui se dirige vers des Playoffs lors desquels il ne fera pas bon croiser leur route.
Puis dans la nuit du 25 au 26 mars c’est le drame. Deuxième prolongation d’un match face aux Nets, Nurkic est au four, au moulin et au bourre-pif avec déjà 32 points, 16 rebonds, 5 passes et 4 contres, et sur un tir raté de Mo Harkless le géant s’élève pour claquer un rebond off mais perd l’équilibre. La suite ? Pfiou… 120 kilos de barbaque qui s’écroulent, la jambe gauche qui soudainement ressemble à un Z et toute une salle qui se retient de vomir alors que Nurkic se tient la tête en tête les mains. On assiste alors aux images habituelles de joueurs qui préfèrent fuir l’évidence, d’un coach impassible mais dont on sent que les larmes montent, alors que Rodney Hood est le premier à oser s’approcher de son compagnon de galère pour lui apporter un peu de réconfort. Pas besoin d’être docteur pour comprendre que la jambe est brisée, tibia-péroné, et qu’on ne reverra pas ce bon Jusuf avant un long, un très long moment.
Double-fracture rapidement confirmée et si les Blazers réussiront tant bien que mal à être la darling des Playoffs 2019 grâce à cette flamme qui ne voulait pas s’éteindre, l’absence de Jusuf Nurkic pèse. Et elle aura surtout pesé cette saison finalement, les performances pourtant positives de son remplaçant Whiteside n’ayant pas suffi à garder les Blazers parmi les équipes qui gagnent. Départs de Meyers Leonard, Seth Curry, Mo Harkless, Enes Kanter, Al-Farouq Aminu mais surtout absence de Nurk’ et très vite de Rodney Hood, trop de poids dans la colonne moins et Portland prie aujourd’hui pour retrouver un Jusuf Nurkic dominant, pour jouir enfin d’un Big Three au sommet de sa forme. De retour à l’entraînement le 20 janvier dernier, le géant a pu durant un an nous prouvé qu’il était capable d’aller très loin… vestimentairement en étant l’attraction principale de son banc, à lui désormais de nous montrer qu’un babar de 2m14 et 120 kilos est capable de revenir d’un an et demi de sitting.
Une sensation capillaire depuis un an, un swag incommensurable, mais nous ce qu’on veut c’est revoir Jusuf mettre des baffes et claquer des five by five. Il en va de la survie des Blazers dans les hauteurs de l’Ouest, tout simplement.