L’éloge funèbre très prémonitoire de Pierre Desproges à Guy Bedos


Les deux humoristes, qui possédaient en commun un humour diablement caustique, s’estimaient et s’aimaient. En 1986, pour les vingt ans de métier de l’amoureux de Paulette le procureur du tribunal des flagrants délires lui fit un cadeau au «10e degré».

Guy Bedos et Pierre Desproges étaient très amis. En 1986, lors d'une émission intitulée Ma plus belle histoire d'humour, Desproges avait enterré vivant son ami et complice dans un sketch hilarant.
Guy Bedos et Pierre Desproges étaient très amis. En 1986, lors d’une émission intitulée Ma plus belle histoire d’humour, Desproges avait enterré vivant son ami et complice dans un sketch hilarant. Leemage

Quel plaisir indicible de pouvoir écouter son éloge funèbre. Cette joie Guy Bedos a pu la ressentir de son vivant quand Pierre Desproges eut l’idée rare – et inévitablement un jour… prémonitoire -, de prononcer un compliment à sa façon à celui qui l’avait adoubé dans la profession du rire en voyant en lui un disciple qui possédait toutes les qualités pour devenir à son tour le maître incontesté de l’humour absurde.

La scène se déroule en 1986. Pour «ses vingt ans de métier» Guy Bedos a réuni tous ses amis pour une émission intitulée Ma plus belle histoire d’humour. Jean-Loup Dabadie est assis à sa gauche. Pierre Desproges, devant son pupitre, a décidé de lui offrir un cadeau, un éloge funèbre… très prémonitoire. L’envolée, comme il se doit est lyrique. On dirait du Bossuet ou du Malraux: «Guy Bedos n’est plus. La France perd le meilleur de ses fils et la rampe le meilleur de ses feux. Que dire du désarroi qui nous broie et de la douleur qui nous noue sinon quand nos cœurs l’un et l’autre cohabitent, pour reprendre le cri d’amour du crapaud.»

« Le pétomane pro-palestinien Guy Bedos, né Bedostein, vient de passer l’arme à gauche. »

Pierre Desproges imaginant la nécrologie de Guy Bedos écrite par Minute

Bedos et Dabadie se tiennent les côtes. Les larmes aux yeux, ils attendent avec impatience la suite de ces louanges mouillées d’acide. Desproges imagine que toute la presse va pleurer l’amoureux de Paulette le lendemain de sa mort. Et même Minute, le journal d’extrême droite, sous la plume d’un certain «Adolphe Croix-de-Feu» lui tresse une couronne de lauriers posthume bien particulière en écrivant que « le pétomane pro-palestinien Guy Bedos, né Bedostein, vient de passer l’arme à gauche.»

Dernier paradoxe de cette oraison, Pierre Desproges, un tantinet plus jeune que son confrère, se voyait bien lui survivre. Et comme il se doit, il promit de continuer son œuvre: «Adieu l’artiste, va en paix. Tu peux compter sur moi, je saurai m’occuper de ta veuve et de ton cher public.» Aujourd’hui 34 ans après, les deux «comiques troupiers» sont de nouveau ensemble au paradis, protégé par saint Jean-Loup Dabadie, pour le meilleur et pour le rire.

L’éloge funèbre de Pierre Desproges à Guy Bedos, déclamé… en 1986.

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