Le New York Times donne une leçon de journalisme à Ronan Farrow


La grande famille du cinéma ? Très peu pour lui. N’en déplaise à ses parents, Ronan Farrow n’a pas choisi le septième art, voie toute tracée par son ascendance pour faire carrière, mais le quatrième pouvoir. Aujourd’hui, on n’évoque plus le lauréat du prix Pulitzer 2018 comme le fils de Woody Allen et Mia Farrow, mais comme l’homme qui a fait tomber Harvey Weinstein.

Médiatisée partout à travers le monde, son enquête sur le harcèlement sexuel à Hollywood a conduit à la condamnation du producteur à vingt-trois ans de prison. Elle a également rebattu les cartes dans le monde du cinéma et questionné en profondeur la société américaine. Mais tout cela est-il trop beau pour être vrai ?

La question est posée par le New York Times , dans une enquête signée Ben Smith. Le journaliste, ancien rédacteur en chef de Buzzfeed News, s’interroge sur la rigueur de Farrow. Un article publié en 2018 par Farrow dans le New Yorker sèmerait le doute sur son respect déontologie.

Le reporter de 32 ans y explique que le département du Trésor des États-Unis aurait fait disparaître des registres publics des documents de Michael Cohen, l’ancien avocat de Donald Trump. Or, il a été prouvé que lesdits documents étaient en fait en accès restreints – une procédure fréquemment utilisée pour éviter une éventuelle fuite. Une potentialité certes évoquée dans son article mais minimisée par Farrow, souligne Smith. Mais ce n’est pas tout ! Dans cette histoire, il aurait également réduit le rôle de Michael Avenatti, avocat farouchement anti-Trump inculpé pour tentative d’extorsion en février dernier.

«M. Farrow n’est pas un menteur»

Alors, omissions ou manque de rigueur caractérisé ? «Sa narration est très cinématographique – avec des gentils et des méchants – et omet souvent la nuance et les détails qui pourraient nuire à la dramaturgie du récit, écrit Ben Smith, pas franchement confraternel. Il lui arrive parfois de ne pas suivre les impératifs journalistiques de la corroboration des faits et la transparence, ou bien de suggérer l’existence de complots attrayants mais qu’il est incapable de prouver.»

«M. Farrow n’est pas un menteur, nuance toutefois le journaliste du New York Times. Son travail peut induire en erreur, mais il n’invente pas des faits.» Tentation à laquelle un journaliste aussi engagé que Farrow serait soumis, à une époque où la stigmatisation sur les réseaux sociaux importe parfois plus que la vérité, déplore encore Smith.

Le journaliste interroge ensuite plusieurs collègues du Pulitzer au New Yorker. Notamment son rédacteur en chef David Remnick qui voit dans le travail de son protégé un journalisme «scrupuleux, infatigable, et, par-dessus tout, juste» et Ken Auletta, rédacteur contacté par Farrow dans le cadre de son article sur Harvey Weinstein, qui évoque quelques lacunes dans le travail mais souligne les résultats bénéfiques de l’enquête.

Dans son droit de réponse au média américain, Farrow a dit mettre «de l’attention, de la rigueur et de la nuance» dans chacun de ses articles. Avant de conclure : «Je suis fier de toutes mes publications qui ont aidé à mettre à jour les agissements malfaisants et des histoires importantes dans la sphère publique.»

.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*