Disney se fâche avec les fans de Star Wars en les basculant du Côté obscur du copyright


Plus qu’une affaire d’hashtag, c’est une affaire de droit. Sur les réseaux sociaux, Disney Plus a incité les internautes à partager leurs souvenirs de la franchise Star Wars en prévision du 4 mai. Ce jour est en effet considéré comme le Star War Day en raison du jeu de mot associant #MayThe4th et la plus célèbre réplique des films «May the Force» («Que la Force soit avec vous»). Initiative sympathique si Disney n’avait pas assorti son invitation d’une mise en garde digne du Côté obscur du copyright. «En partageant votre message avec nous en utilisant #MayThe4th, vous acceptez notre utilisation du message et le nom de votre compte dans tous les médias et nos conditions d’utilisation», stipule Disney Plus. Le royaume de la magie et la poésie de la Force en prenait un coup. Quelques heures plus tard, un autre tweet tentait bien de rattraper le coup en expliquant que «le langage juridique ci-dessus s’applique UNIQUEMENT aux réponses à ce tweet utilisant #MayThe4th et mentionnant @DisneyPlus». Mais il était trop tard.

Comme des Banthas excités par un chiffon rouge, les internautes n’ont pas tardé à s’offusquer et à se moquer de Disney et de sa volonté de «privatiser» #MayThe4th. «Je suis né le 4 mai. Cela signifie-t-il que vous êtes techniquement propriétaire de mon anniversaire? #MayThe4th», fait mine de s’interroger The Millenial Musician. «En lisant mon tweet, Disney accepte de me payer 1 million de dollars US au plus tard le 4 mai 2020. #OnPeutÊtreDeuxAJouerACeJeu», embraye Mark Sweeney, un brin provocateur.

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Si la situation paraît amusante, elle soulève une vraie question qu’un tweet mentionnant Jack Dorsey, le directeur général de Twitter, résume : «À quel moment intervenez-vous et dites précisément que les hashtags n’appartiennent à personne ?»

Interrogé par le New York Times , le professeur de droit Michael Carrier estime que la propriété intellectuelle et le droit d’auteur de ce genre de publications sont bousculés par les réseaux sociaux. «Il faut se demander si sur Twitter, les conditions d’utilisation mentionnent un transfert de propriété entre l’utilisateur et la plateforme. Si c’était le cas, alors Twitter disposerait des droits d’auteur. Mais ça ne l’est pas.»

Et si Twitter n’a pas les droits sur vos tweets, Disney encore moins. «Le droit d’auteur existe pour protéger la création et il existe dès le moment où vous créez quelque chose, déclare Michael Carrier. Lorsque quelqu’un tweete, cette personne a un droit d’auteur sur ce contenu. Peu importe si vous envoyez un message à Disney, peu importe si vous utilisez un hashtag que Disney a dit d’utiliser, peu importe si vous mentionnez Disney Plus.»

En France, le code de la propriété intellectuelle encadre et protège les créations, quelles qu’elles soient. L’article L122-4 dispose alors que «toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque».

Mais comme toute règle, elle a son exception. L’article L122-5 précise les situations où l’auteur, une fois l’œuvre divulguée, ne peut l’interdire. Les revues de presse, les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information ainsi que d’autres font partie de ces cas à part, où l’utilisation d’une œuvre est tout à fait légale, à condition que le nom de l’auteur et la source soient indiqués clairement.

Si Disney n’a finalement aucun droit sur les tweets et fait désormais profil bas, ce n’est pas la première fois que le studio tente un coup de la sorte. En 2013, un peu avant la sortie de son chef-d’œuvre Coco, il a tenté de déposer la marque «Dia de los muertos» («le jour des morts» en espagnol). La fête traditionnelle mexicaine aux mains de Disney ? La tentative a échoué grâce à une pétition largement partagée et la maison aux grandes oreilles a encore un peu plus entaché sa réputation. Cette fois encore, la souris s’est fait manger par plus gros qu’elle.

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