Le ballon rond dans le petit filet du cinéma


Football et cinéma, les liaisons malheureuses ? Dans leur excellent ouvrage Sport & cinéma (éditions du Bailly de Suffren), Julien et Gérard Camy reconnaissent que le sport le plus universel a rarement servi la cause de l’art le plus populaire. La réciproque est vraie.

Plus de 270 films mettent en scène le football depuis le cinéma muet et on recense peu de chefs-d’œuvre, à la différence de la boxe. La faute à la télévision, capable de filmer le foot avec les moyens d’un blockbuster (travelling, gros plan…) et avec la vraie incertitude du sport. Pas de scénario écrit à l’avance, une dramaturgie plus forte que le meilleur des films à suspense. Quand Disney produit Goal ! : naissance d’un prodige, récit de l’ascension d’un jeune Mexicain transféré à Newcastle, le résultat est catastrophique. À nous la victoire, de John Huston, n’est pas beaucoup plus palpitant, malgré un casting rutilant (Pelé, Bobby Moore, le capitaine de l’Angleterre championne du monde en 1966, et Luis Fernandez).

Vestiaires et coulisses

Ken Loach est plus inspiré quand il recrute, dans Looking for Eric, le vrai Éric Cantona, légende vivante de Manchester United, pour regonfler le moral d’un fan au bout du rouleau. Les Anglais, inventeurs du football, s’en tirent peut-être le mieux. On pense à The Damned United, de Tom Hooper (avant Le ­Discours d’un roi) ou à Joue-la comme ­Beckham, de Gurinder Chadha.

Là où le cinéma a une carte à jouer, c’est en dehors du terrain, dans les vestiaires et les coulisses d’un sport business qui est aussi un phénomène de société. En Italie, Ultimo minuto, de Upi Avati, fait d’Ugo Tognazzi un manager prêt à tout pour sauver son club. Ultra, de Ricky Tognazzi, montre le quotidien d’un groupe extrémiste, plus porté sur la baston que sur le beau jeu. Le hooligan est un bon client pour la fiction.

Dans À mort l’arbitre, Jean-Pierre Mocky règle aussi ses comptes avec les supporteurs bêtes et méchants. Jean-Jacques Annaud étrille la démagogie du ballon rond dans Coup de tête. Quant à Didier, la comédie d’Alain Chabat, elle est la preuve supplémentaire que le cinéma ne prend pas le football très au sérieux. On conseillera plutôt deux documentaires : Diego Maradona d’Asif Kapadia et Zidane, un portrait du XXIe siècle de Philippe Parreno et Douglas Gordon, film quasi expérimental sur le génial numéro 10.

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