Placido Domingo, banni des scènes après les accusations de harcèlement sexuel


«Si je me repose, je rouille»: telle est la devise de Placido Domingo, célébrissime artiste doté d’une force de travail peu commune, qui s’est produit plus de 4.000 fois et a enregistré plus de 100 albums. Mais le «roi de l’opéra», stupéfiant par son aura sur scène, a été rattrapé par le mouvement #MeToo et des accusations de harcèlement sexuel aux États-Unis.

Dans des enquêtes publiées en août et septembre par l’agence Associated Press, une vingtaine de femmes ont affirmé avoir été harcelées par Domingo à partir de la fin des années 1980. Elles l’accusaient d’attouchements, de baisers forcés et remarques déplacées et d’avoir nui à leur carrière en cas de refus.

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De quoi ternir la légende d’un artiste couvert d’éloges, de prix et de décorations. Celui que ses fans appellent tout simplement «Placido» a été loué pour la beauté et la richesse de son timbre sombre, sa musicalité, son sens de la prosodie et son jeu d’acteur. Il est aussi apparu comme le chanteur lyrique le plus actif de la planète, capable, un soir de 1993, de chanter deux rôles dans deux théâtres de Vienne en prenant le tramway entre les deux pour se reposer.

Baryton devenu ténor

Placido Domingo est né le 21 janvier 1941 à Madrid, où il a grandi dans une famille de chanteurs de zarzuelas, les traditionnelles opérettes madrilènes. Il a huit ans lorsque ses parents déménagent au Mexique, où il étudie le piano, la direction d’orchestre puis le chant au Conservatoire de musique de Mexico. Il débute en chantant des zarzuelas avec ses parents en tant que baryton. Puis, à force de travail, sa tessiture change et il devient ténor.

À 20 ans, à Monterrey au Mexique, il obtient son premier grand rôle: Alfredo dans «La Traviata» de Verdi, avant de passer trois saisons à l’Opéra national de Tel Aviv, pendant lesquelles il donnera 280 représentations dans douze rôles différents. En 1965, le rôle de Pinkerton dans «Madame Butterfly» à New York lance sa carrière internationale. Et dès 1973, il dirige lui-même sa chère «Traviata» au New York City Opera et s’illustre en tant que chef d’orchestre sur tous les continents.

La scène est ma vie

Placido Domingo

À Berlin-Ouest, en 1986, un public enthousiaste l’applaudit durant plus d’une heure, battant le record de 103 rappels, après sa performance dans «Othello» de Verdi. Puis il forme en 1990, le trio des «Trois ténors» avec Luciano Pavarotti et José Carreras, qui attirera à travers le monde un immense public, au pied de la Tour Eiffel à Paris comme dans la Cité interdite à Pékin. «La scène est ma vie», lançait Domingo en 2011 à l’opéra de Madrid, où une pléiade de chanteurs lui rendait hommage pour son 70e anniversaire au cours d’un concert surprise diffusé dans une vingtaine de pays.

Mais aujourd’hui, il ne peut plus chanter la «Traviata» dans ce même Théâtre royal: il a lui-même annoncé jeudi qu’il renonçait à se produire sur cette scène madrilène comme dans d’autres maisons «qui auraient des difficultés à assumer» leurs engagements avec lui. Les accusations de harcèlement avaient déjà mis fin à sa carrière aux États-Unis où il avait dû renoncer à l’automne au poste de directeur général de l’Opéra de Los Angeles.

Directeur artistique puis général de l’Opéra national de Washington entre 1996 et 2011, il a notamment été accusé d’avoir poursuivi dans cette institution des chanteuses de ses avances bien trop insistantes. Il a présenté mardi ses excuses aux femmes l’ayant accusé, en indiquant accepter «toute la responsabilité de (ses) actes». Il a cependant réaffirmé jeudi n’avoir «jamais été agressif envers personne» ni «rien fait pour nuire à la carrière de quelqu’un».

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