Avec la crise économique et une défiance vis-à-vis du pouvoir, les Iraniens pourraient bien bouder les urnes ce vendredi et favoriser la victoire des ultraconservateurs.
C’est un jour crucial en Iran : les Iraniens votent ce vendredi pour élire un nouveau Parlement, dans un scrutin où les conservateurs partent favoris, portés par un ressentiment populaire contre le président modéré Hassan Rohani, alimenté entre autres par la crise économique que vit le pays.
Les bureaux de vote ont ouvert ce matin, et le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, selon son habitude, a glissé son bulletin dans l’urne dès l’ouverture du scrutin. Ali Khamenei a renouvelé son appel aux quelque 58 millions d’électeurs à participer massivement afin de « garantir l’intérêt national » et à voter « aussi vite que possible », alors que l’abstention pourrait être importante.
Défiance et abstention?
La onzième législature à sortir des urnes depuis la révolution islamique de 1979 commencera son travail dans un contexte de tensions exacerbées entre Téhéran et Washington, et alors que l’Iran traverse une violente récession.
Les élections se tiennent aussi près d’un mois et demi après que les forces armées iraniennes eurent abattu « par erreur » un avion de ligne ukrainien, drame qui a ajouté à la défiance de la population vis-à-vis des autorités.
Leur aveu, survenu trois jours après les faits, a provoqué des manifestations antipouvoir, certes limitées mais faisant voler en éclats l’apparence d’unité nationale manifestée quelques jours plus tôt à l’occasion des funérailles du général iranien Qassem Soleimani, tué par une frappe américaine en Irak le 3 janvier. Et nombre d’habitants ont ainsi fait part dans les médias de leur refus d’aller voter ce vendredi.
Conservateurs vs ultraconservateurs
Figure réformatrice, Sadeq Zibakalam, professeur à l’université de Téhéran, notait par ailleurs jeudi dans le journal Arman que « le changement attendu n’a pas eu lieu ». La disqualification de milliers de candidats réformateurs et modérés réduit pratiquement le scrutin à un affrontement entre conservateurs et ultraconservateurs et pourrait alimenter l’abstention.
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Après ces disqualifications massives par le Conseil des gardiens, organe aux mains des conservateurs chargé du contrôle des élections, moins de 7200 candidats se retrouvent donc en lice ce vendredi pour briguer les 290 sièges du Parlement, selon le ministère de l’Intérieur.
Récession économique
En fonction du poids des ultras dans la future Assemblée, la politique extérieure d’ouverture, poursuivie par Hassan Rohani depuis son élection en 2013, pourrait changer. Les ultraconservateurs s’opposent à toute négociation avec l’Occident et critiquent régulièrement ce qu’ils estiment être la passivité de Hassan Rohani face aux menaces du président américain Donald Trump.
Et ils sont impatients de sortir de l’accord international sur le nucléaire iranien, la grande réalisation de Hassan Rohani, désormais menacée d’implosion depuis que Donald Trump l’a dénoncé unilatéralement en 2018.
Dans l’esprit du président iranien, l’accord de Vienne devait ouvrir une ère de prospérité pour l’Iran en le sortant de son isolement international. Au lieu de cela, le retour des sanctions américaines a plongé le pays dans une violente récession.
Plusieurs figures réformatrices ont donc mis en garde contre une victoire des ultraconservateurs en cas de forte abstention ce vendredi. La participation aux dix dernières élections a atteint en moyenne 60,5%, selon l’Intérieur. Les bureaux de vote doivent fermer à 18h (heure locale), mais la durée du scrutin est souvent prolongée, notamment à Téhéran.