Virus de la tomate : les producteurs en alerte rouge


L’apparition en France de ce virus particulièrement agressif pour les tomates met toute la filière sur le qui-vive pour limiter le risque de contagion.

Branle-bas de combat dans le secteur de la tomate. L’apparition d’un nouveau virus touchant les précieux légumes a été confirmée lundi soir par le ministère de l’Agriculture dans une exploitation du Finistère. « On a reçu les résultats de l’Anses (Agence de sécurité sanitaire) sur les échantillons prélevés dans les serres qui étaient en suspicion dans le Finistère et les résultats sont positifs, elles sont donc bien contaminées », a indiqué l’exécutif. 

Si le virus n’a pas d’impact sur l’homme, il est redoutable pour les tomates. Une fois contaminés, les plants commencent à présenter des taches brunes et des nécroses sur les feuilles et les fruits. Ces derniers deviennent alors impropres à la commercialisation, avec une altération de leur goût et de leur texture. « Ce n’est pas que les légumes ne sont plus comestibles, mais quand on les voit, on n’a pas envie de les manger », constate avec dépit Jacques Rouchaussé, président des Producteurs de Légumes de France. 

Ce virus végétal, le « tomato brown rugose fruit virus » (ToBRFV) a été observé pour la première fois en Israël en 2014, avant d’être repéré en Allemagne, en Italie, aux États-Unis et au Mexique en 2018. Puis aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Grèce en 2019, avant qu’il n’arrive en France avec le premier cas confirmé lundi.  

Un fort pouvoir infectieux

« Ce virus a une particularité c’est qu’il est très facilement transmissible. Il suffit d’une micro-blessure à la surface d’une plante pour qu’il puisse être transmis. Par ailleurs, le virus peut survivre plusieurs mois à l’air libre, par exemple sur un sol, des outils ou des vêtements, et rester infectieux », précise Philippe Reignault, le directeur du Laboratoire de santé des végétaux de l’Anses, soulignant qu’un simple insecte peut suffire à transporter la maladie. Par ailleurs, le virus ne concerne pas que les tomates, mais aussi les poivrons et les piments. 

Alors sur le terrain, on s’organise pour faire face. « Des mesures radicales ont été déployées sur cette exploitation, la plaçant sous séquestre complet, pour éviter tout risque de propagation », a commenté ce mardi l’association des producteurs de Tomates et Concombres de France dans un communiqué, invitant à « ne pas céder à la suspicion ». Un plan de surveillance est en cours d’élaboration sur l’ensemble du territoire, et des mesures de prévention sont adressées aux producteurs par le ministère de l’Agriculture.  

Dans ses recommandations, l’exécutif demande notamment aux agriculteurs de procéder au « nettoyage-désinfection systématique des mains après manipulation des plants, semences, ou fruits de tomates », et de contacter la Draaf (Direction Régionale de l’Agriculture et de la Forêt) « immédiatement » en cas de « symptômes évocateurs » sur certains plants. « L’un des aspects de la dangerosité du virus, c’est qu’il n’existe aucun traitement efficace, par ailleurs aucune Crumpa de tomate n’est résistante », détaille Philippe Reignault.  

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De fait, en cas de contamination, les plants doivent être arrachés puis incinérés, et l’ensemble du site de production désinfecté. Un problème de taille alors que la France compte environ 1500 producteurs sur son territoire, avec 712 000 tonnes produites en 2018. « Il faut être très restrictif quand on a des cas confirmés. Grâce à ces mesures draconiennes, on limitera les risques de propagation », veut croire Jacques Rouchaussé.  

Quelles conséquences économiques ?

Reste tout de même une incertitude à court terme. « Jusqu’à présent on connaissait l’existence de ce virus, mais désormais un cas a été confirmé en France. Donc c’est un sujet qui nous préoccupe », témoigne Damien Houdebine, secrétaire national de la Confédération Paysanne, en charge du végétal. 

Même chose pour Jacques Rouchaussé, qui craint les conséquences financières pour certains exploitants. « Ça nous inquiète parce que cela peut être très préjudiciable économiquement pour les agriculteurs touchés. Et d’autant plus si l’exploitation ne produit que de la tomate », se tourmente-t-il.  

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Pour l’Anses, les impacts liés au ToBRFV sont effectivement « essentiellement économiques ». « Il est important de rappeler que pour les plantes cultivées dans des conditions protégées, comme les tomates, les fluctuations annuelles de rendement sont normalement très faibles et une perte de rendement supérieure à 10% peut être considérée comme un impact très important », note l’agence. Selon les pays, ce taux de perte avait été plus ou moins élevé : allant de 8% aux Pays-Bas, à 55% en Chine, et même jusqu’à 100% en Jordanie.  

De là à y voir un risque de hausse des prix des tomates ? « On n’en est pas encore là », tempère Jacques Rouchaussé. « Mais on va rester très vigilant sur l’évolution du virus », ajoute-t-il, prudent. Car l’enjeu est de taille, la tomate est le premier légume (en botanique, elle est bien considérée comme un fruit) consommé par les Français avec près de 13,9 kg par an. Quant aux jardiniers amateurs, mauvaise nouvelle : leurs plants peuvent aussi être touchés par le virus. Lorsque la saison sera venue, comme pour les professionnels, une déclaration à la Draaf s’imposera en cas de symptômes évocateurs. 

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