Châteaubriant (France) – Porté aux nues dans les métropoles, le vélo n’a pas toujours la cote en campagne et en zone périurbaine, où la voiture reste indétrônable. Même si un « frémissement » se fait sentir ici ou là
« Alors, c’est comment le vélo à Châteaubriant ? » Un long silence s’installe parmi les adhérents de l’association Véli-vélo. « C’est pas comme on voudrait. Il y a des aberrations« , finit par lâcher Catherine, retraitée de 62 ans. « Ce n’est pas du tout sécurisant, je ne suis pas à l’aise en ville« , ajoute Marie-Claire, travailleuse sociale de 58 ans.
En ce samedi matin de janvier, une quinzaine d’adhérents sont venus faire marquer leur vélo au foyer-restaurant, face au château du XIe siècle de cette petite ville de 12.000 habitants, entre Nantes et Rennes. En 2017, la commune avait été notée « F« , c’est-à-dire ville « défavorable » au vélo, par le baromètre des villes cyclables de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB). Cette note s’est améliorée à « D » en 2019, soit « ville moyennement favorable au vélo« .
« Il y a des aménagements vitrines, des choses qui coûtent cher mais ne sont pas forcément satisfaisantes« , estime cependant Marie-Laure Pantecouteau, présidente de Véli-vélo, association créée en 2015 à Châteaubriant et qui compte près de 200 adhérents.
Cette infirmière de 60 ans, qui conseille à ses patients de pédaler pour leur santé, regrette le manque de « volonté politique » de la mairie en faveur du vélo. L’association doit ainsi batailler pour que les rues limitées à 30 km/h puissent être empruntées en sens interdit par les vélos, comme c’est la règle partout en France. Sauf à Châteaubriant où le maire Alain Hunault (LR) l’a interdit par arrêté municipal.
« Ils nous promettent des choses qu’après ils ne tiennent pas« , regrette Mme Pantecouteau.
La première adjointe au maire Catherine Ciron met elle en avant des « contingences techniques » et assure que la ville mène une « politique volontariste » en faveur du vélo avec 7,53 euros dépensés par habitant et par an (contre 8 euros en moyenne en France) et une « accélération en fin de mandat« .
« On sait bien qu’il y a une demande de la part des habitants. Ici, les distances sont courtes et le vélo est tout à fait adapté« , affirme-t-elle, en assurant que la ville était prête « à franchir le pas » concernant les doubles sens cyclables en zone 30. « Ça ne va jamais assez vite pour certains mais nous on continue« , assure l’élue.
– 3% des déplacements –
Si le vélo n’est pas le thème de campagne N.1, « on sent un frémissement chez les maires des territoires ruraux« , analyse Olivier Schneider, président de la FUB. « Les habitants des zones rurales disent: nous aussi, on a le droit de se déplacer à vélo. Mais les maires ruraux ne sont pas toujours hyper enthousiastes: ils ont déjà du mal à boucler leur budget« .
Seuls 27% des cyclistes jugent que la situation s’est améliorée dans les villes de moins de 20.000 habitants, contre 56% dans celles de plus de 200.000 habitants, selon le baromètre de la FUB.
Le paradoxe, c’est qu’il y a 30 ans, « c’est dans les petites villes que la pratique du vélo était la plus importante« , souligne Nicolas Mercat, chef de projet pour le cabinet de conseil Indiggo.
Mais l’urbanisme s’est développé autour de la voiture avec de grandes zones commerciales et de « gros giratoires« . « Ce sont des espaces qui ne sont pas faits pour le vélo, qui ne sont pas confortables, alors même que les distances sont accessibles« , explique M. Mercat.
« La très forte hausse de la pratique du vélo dans les grandes villes est un trompe-l’oeil car ces villes ne représentent qu’une petite partie de la population française. La pratique continue à baisser en zone rurale et périurbaine« , ajoute-t-il.
En cause: un (gros) déficit en pistes cyclables par rapport aux autres pays européens. Avec 3% des déplacements effectués à vélo, la France se positionne au 25e rang dans l’Union Européenne où l’usage du vélo dépasse les 7% en moyenne (28% aux Pays-Bas).